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RAMOGNINO Pierre
Né le 7 novembre 1909 à Arzew (département
d’Oran, Algérie), décédé le 20 juin
2010 à Angers (Maine-et-Loire) ; professeur de cours
complémentaire ; militant du SNI ; militant socialiste, maire
d’Arzew.
Ses parents, Pierre Ramognino, né à Arzew, en 1882,
patron pêcheur, et Blanche Ferrer, née également
à Arzew en 1884,
mère au foyer, avaient huit enfants. Sa famille paternelle,
originaire de Varazze (République de Gênes), arriva
à Arzew en 1852. Son père fut naturalisé
français d’office le 22 octobre 1889 comme tous les
ressortissants de la péninsule italienne, à
l’occasion du premier centenaire de la Révolution
française. Sa famille maternelle arriva en Algérie avant
1850, originaire de Calpe (Province de Valence, Espagne). Son
arrière grand-père et son grand-père
participèrent à la construction des fortifications
d’Arzew. Ses parents étaient de sensibilité
socialiste et par tradition familiale de confession catholique.
Pierre Ramognino commença ses études à
l’école primaire publique d’Arzew jusqu’au
certificat d’études primaires. Il quitta alors
l’école et fit avec son père et ses deux
frères aînés l’apprentissage du métier
de marin-pêcheur. Grâce à son ancien directeur
d’école, franc-maçon, il reprit ses études
au cours complémentaire d’Arzew et prépara le
concours d’entrée à l’Ecole Normale
d’instituteurs d’Alger (Bouzaréah) dans la promotion
1927-1930. Il obtint le brevet supérieur.
Pour son premier poste d’enseignant, il fut affecté, en
1930-1931 à Fornaka dans l’estuaire de la Macta assainie
après avoir été un marécage mortellement
paludéen et prit en charge une classe unique de cinquante
élèves. De 1931 à 1933, il
enseigna à Relizane aux confins des monts Ouarsenis. Puis en
1933, il fut nommé au cours complémentaire d’Arzew
où il resta jusqu’à sa révocation comme
syndicaliste et franc-maçon en 1940. Marie Roca, institutrice
qu’il avait épousée entre temps, fut
révoquée en même temps.
Après un bref passage aux jeunesses anarchistes de la
Fédération anarchiste ibérique et de la
Confédération nationale du travail, à la Ligue des
combattants de la Paix avec René Gérin. Pierre
Ramognino adhéra au Parti socialiste SFIO en 1932.
Au début de 1933, Pierre Ramognino créa l’Union
locale des syndicats CGT d’Arzew et assura notamment le
secrétariat administratif du syndicat des dockers, tous
musulmans et du syndicat des pêcheurs quasiment tous
illettrés. Il fut au cœur des luttes syndicales et des
grèves entre 1932 et 1936. Par exemple, dans le bâtiment,
à l’occasion du chantier d’extension du port
d’Arzew, le syndicat se heurtait à la
société des « Grands Travaux de Marseille ».
300 ouvriers, renvoyés et inscrits sur les listes noires du
patronat, ne trouvèrent plus de travail en Algérie et
durent se replier pour la plupart sur l’autre rive de la
Méditerranée. Dans le groupe Saint-Gobain qui exploitait
les salines, le syndicat obtint, après des luttes âpres,
le classement des ouvriers comme travailleurs de l’industrie
chimique. Les dockers firent un mois et demi de grève avant de
pouvoir en 1936 bénéficier des mêmes avantages que
leurs collègues de métropole. Il négocia
difficilement avec les acconiers d’Arzew pour que la loi
française soit appliquée en Algérie. Pour les
pêcheurs, après deux grandes luttes, il créa une
coopérative d’achat et de vente des poissons,
s’opposant aux mareyeurs en garantissant les prix du poisson et
obtint la reconnaissance de la qualité de travailleurs pour les
membres des équipages. Pour les ouvriers agricoles, les
résultats furent plus minces (les vendangeuses furent
payées presque comme les hommes et le travail des enfants mieux
rémunéré).
En outre, Pierre Ramognino anima la solidarité avec les Républicains espagnols.
Membre du Syndicat National des Instituteurs dès sa sortie de
l’ENI, responsable de la section cantonale d’Arzew de 1932
à 1939, membre du bureau pour l’Oranie lors de la
reconstitution du SNI en Algérie après le 8 novembre
1942, il milita jusqu’à sa retraite en 1955. Il fut membre
de la mutualité enseignante française et fut
administrateur de la section de la Mutuelle générale de
l’Education nationale à Oran après
l’indépendance de l’Algérie.
De 1939 à 1944, Pierre Ramognino, révoqué, reprit
alors le métier de pêcheur qu’il pratiqua avec un
équipage de 25 hommes. Pendant cette période, il fut
membre du comité directeur pour Oran du groupe «
Combat-Algérie » de Léon Teitgen, de Mentrhon, Daniel Mayer. Il y représenta le Comité
d’action socialiste. Ce groupe comprenait des chrétiens
dont un père dominicain, des enseignants juifs chassés de
leurs postes des communistes, des francs-maçons.
Ce groupe clandestin, qui tenait ses réunions à Oran au
siège du journal Oran Républicain, était
chargé de cacher, héberger et aider les
évadés du camp de concentration de Méchéria
à passer à Gibraltar. Il fournissait des renseignements
sur la baie d’Arzew, sur Mers-El-Kébir et sur la base
aérienne de Lartigue. Il joua un rôle important dans la
mise à l’écart du général Giraud et
son remplacement par le général de Gaulle. En 1943,
après le débarquement allié à Arzew, il
s’emparera « révolutionnairement » de la
mairie en remplaçant le maire nommé par les
autorités « giraudistes ». Selon Parcours
(décembre 1990), il assura le secrétariat de la
fédération socialiste SFIO d’Algérie de 1943
à la fin de 1945.
En 1944, Pierre Ramognino fut affecté administrativement sur un
poste d’enseignant qu’il ne prit qu’après son
retour pendant les dix ans de son mandat de maire d’Arzew pendant
lequel il réorganisa la coopérative de pêcheurs,
réalisa des œuvres sociales (aides aux personnes
âgées), l’assainissement, la réfection des
égouts, le reboisement… Toujours socialiste SFIO, il
adhéra à l’association « Citoyens du monde
»
Durant la guerre d’Algérie, Pierre Ramonigno assura la
permanence de la fédération socialiste d’Oranie et
fut chargé de mission au cabinet de [Robert Lacoste->115075],
ministre de l’Algérie. Il s’efforça de
maintenir le maximum de relations avec le monde algérien.
Condamné à mort par l’OAS, il fit rentrer en France
ses enfants, mais resta en Algérie avec son épouse
jusqu’en juillet 1962 malgré les deux plasticages de son
appartement.
Pierre Ramognino et son épouse revinrent d’Algérie
dès octobre 1962. Retraité il se mit au service de la
coopération entre la France et le nouvel état
algérien. Il organisa notamment des cours de formation
professionnelle pour les jeunes enseignants français
recrutés sans qualification pour faire face à la
rentrée scolaire de 1962-63. Par ses démarches, il
obtint des autorités françaises et des ambassades des
pays arabes un fonds de livres pour reconstituer la bibliothèque
pédagogique d’Oran.
Toujours socialiste, Pierre Ramognino fut membre du Parti socialiste et
membre du bureau de la section de La Seyne-sur-mer (Var) après
1962.
Pierre Ramognino, initié à la loge « Union
africaine » (Grand Orient de France en 1938, la dirigea
clandestinement entre 1962 et 1968. Vénérable
d’Honneur, chevalier Rose Croix, 18° au rite français,
il fut fait chevalier des Palmes académiques, Chevalier dans
l’Ordre national du mérite, chevalier de la Légion
d’Honneur.
Sources : Témoignage de l’intéressé.
Guy Le Néouannic