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Jean-Claude AUTRAN
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Conférences et écrits de Jean-Claude AUTRAN

Biographie de Marius AUTRAN
Texte publié (pp. 674-680) dans : Regards sur deux terroirs - La Seyne-sur-Mer et Saint-Mandrier, Cahiers du Patrimoine Ouest-Varois n° 14 (H. Ribot et A. Peretti, coordinateurs), Editions du Foyer Pierre Singal, Sanary-sur-Mer,, et Centre Archéologique du Var, Toulon, avril 2012, 712 p. + 32 planches couleurs hors texte



L’enfance et la scolarité

Né à La Seyne-sur-Mer le 2 décembre 1910, Marius Autran était le fils unique de Simon Autran, 23 ans, et de Victorine Aubert, 20 ans, qui s’étaient mariés à Marseille le 30 janvier 1909.

À la naissance de Marius, son père était simple matelot mécanicien. Il avait même été, dès 14 ans, apprenti forgeron aux Forges et Chantiers des La Seyne. Il descendait d’ailleurs d’une lignée de forgerons, chaudronniers, maréchaux-ferrants (qu’on appelait lei manjo-fer) qui avaient exercé successivement dans plusieurs villages du Var et à Marseille.

Son grand-père, Auguste Autran, forgeron, avait été actif  lors des combats de la Commune de Marseille en 1871. Il fut connu comme un des premiers syndicalistes des Forges et Chantiers de La Seyne et plusieurs fois licencié pour ses activités.

Quant à la mère de Marius, elle était née à La Seyne et descendait de vieilles familles seynoises et six-fournaises, les Aubert, Hermitte, Mabily. Elle fut brièvement modiste avant son mariage, mais ne travaillera plus par la suite, se consacrant à son ménage et à l’éducation de son fils.

En 1914, Simon Autran est affecté à l’arsenal de Ferryville (Tunisie) où il travaillera jusqu’en 1922. Pendant cette période, le jeune Marius ne va habiter avec ses parents et fréquenter l’école de Ferryville qu’en 1914-1916, puis en 1919-1920. Le reste du temps, ayant dû être ramené en métropole pour raisons de santé, il habite chez ses grands parents Aubert à Mar-Vivo et fréquente la petite école des Sablettes.

C’est peut-être l’époque la plus heureuse de sa vie car ses grands-parents lui laissent une totale liberté. La mer, la pêche, les criques rocheuses et les collines l’attirent et cette passion ne le quittera plus. Il mène pendant plusieurs années une vie d’enfant solitaire, à demi sauvage, et apprend aussi de ses grands-parents le parler provençal.

En 1922, ses parents retournent de Tunisie et Marius Autran habite alors le centre-ville, rue Hoche, et commence sa scolarité à l’école Martini.

Marius Autran, 18 ans, à l’école normale d’instituteurs

Il y bénéficie de l’enseignement de maîtres d’exception comme M. Aillaud, puis au cours supérieur, du célèbre « quatuor » constitué par ces enseignants d’élite qu’étaient MM. Gueirard, Romanet, Lehoux et Azibert. En 1928, il réussit le concours d’entrée à l’école normale d’instituteurs de Draguignan dans la même promotion que Toussaint Merle, et il y fait la connaissance de Louise Gautier qu’il épousera en 1932.

A la sortie de l’école normale (1931), son service militaire est effectué en partie à l’école des officiers de réserve de Saint-Maixent, puis à Sospel, d’où il sortira sous-lieutenant de réserve au 3ème R.I.A.


La carrière d’enseignant

La carrière d’instituteurs de Marius et Louise Autran peut alors commencer. Ils vont enseigner deux ans dans le petit village de Montmeyan, puis trois ans à Carcès. Ils vont exercer ce beau métier d'instituteur tel qu'ils viennent de l'apprendre à l'école normale, avec amour et à la perfection.

En 1938, c’est le retour à La Seyne où Marius Autran va enseigner jusqu’à la fin de sa carrière. Instituteur détaché à la classe préparatoire à l'école primaire supérieure Martini, il enseigne alors presque toutes les disciplines. En 1942, la création des classes de 6ème moderne va le conduire dans le secondaire où il se spécialisera progressivement dans l’enseignement des sciences naturelles aux classes de 6ème et 5ème, moderne et classique. Bien que prenant le titre de professeur de CEG, il restera toujours l’archétype de l’instituteur de la IIIe République avec, chez Marius Autran « influence spontanée sur l'élève, tenue en respect de la classe sous le simple regard… ». Ils sont des milliers ceux qui, année après année, ont bénéficié des talents pédagogiques de ce remarquable maître d'école. Au cours des mêmes époques, son épouse suit une évolution de carrière semblable en enseignant les mathématiques au collège de filles Curie. Après avoir enseigné 28 ans au collège Martini et, les dernières années, à Beaussier et à Curie, Marius Autran prend sa retraite (juillet 1966), le même jour que ses amis Toussaint Merle et Paul Camoin.


La guerre et la Résistance

La carrière professionnelle de Marius Autran est interrompue momentanément par la guerre et la Résistance. Ses élèves le voient partir au combat en septembre 1939 comme lieutenant d'infanterie. Il défend ardemment sa patrie sur les fronts des Alpes et du Nord-Est. Sa participation à plusieurs batailles (Marne, Moselle, Somme, Oise) et sa conduite lui valent plusieurs citations à l’Ordre de l’Armée, ainsi que la Croix de Guerre et la Croix du Combattant.

Fait prisonnier dans les marais de la Sologne le 19 juin 1940, interné à Pithiviers, il échappera aux Allemands trois semaines plus tard après une évasion sensationnelle et miraculeuse.

Rentré à La Seyne et démobilisé en juillet 1940, il reprend sa classe à la rentrée suivante. Mais, profondément meurtri par la débâcle de l’armée française et l’occupation allemande, il commence quelques mois plus tard à participer à des actions de Résistance (composition, impression et diffusion de tracts, harcèlements du pouvoir de Vichy, collectes au profit des maquis…), de nouveau aux côtés de Toussaint Merle. Le 17 mars 1942, il est arrêté, dans sa classe par la police de Vichy et enfermé à la prison maritime de Toulon. Défendu par Me Le Bellegou, il est libéré le 5 mai suivant pour « insuffisance de charges » et reprend aussitôt courageusement des activités de résistance jusqu'à la fin de la guerre.

Après avoir participé à des opérations avec la première Compagnie de Provence dans la région de Montmeyan où sa famille était repliée, il retourne à La Seyne qu’il retrouve en ruines le 25 août 1944. Il participe aux dernières actions contre l'ennemi et devient membre du Comité de Libération de La Seyne sous la présidence de Pierre Fraysse. A partir de ce jour, et pendant trois décennies, le combattant, l'évadé, l'authentique résistant, l'homme d'honneur et de devoir qu’est Marius Autran, va mettre son énergie au service de sa ville de La Seyne, de sa reconstruction et de son développement.


L’engagement dans la politique et l’action municipale

Les origines ouvrières et l’engagement révolutionnaire, syndical et anticlérical de son grand-père et de son père ont certainement eu une forte influence sur le parcours de Marius Autran. Très jeune, sa nature est celle d’un révolté, d’un homme de conviction, épris de paix et de justice, même s’il n’entrera que plus tard dans l’action politique et syndicale.

C’est à partir de 1935, dans le contexte de la montée des dictatures fascistes en Europe, qu’il commence à s’engager réellement. De simple sympathisant et électeur communiste de Carcès, il devient secrétaire de la section du Secours Rouge International, ainsi que de celle de l'Amicale laïque.

La guerre et l’occupation vont encore accroître son engagement. Ayant adhéré au Parti communiste dès 1941, il participe, avec Toussaint Merle, à la reconstitution du Parti (clandestin) à La Seyne, à la publication du journal L'Écho Seynois et il devient le responsable local du Front National de la Résistance. Après la guerre, il occupe la fonction de Secrétaire de la section de La Seyne du Parti communiste (1947-1957), ainsi que celle de membre du Comité Fédéral du Var (1946-1964).

Mais, outre son courage, la hauteur et la fermeté de ses convictions, ce sont ses capacités d'administrateur intègre, exigeant avec lui-même et avec les autres, souvent autoritaire, qui ont fait la notoriété de l'homme public que devient Marius Autran, 27 ans durant, dans les municipalités à majorité communiste dirigées par Toussaint Merle, puis par Philippe Giovannini.

Toussaint Merle, Philippe Giovannini et Marius Autran, dans le bureau du Maire du nouvel hôtel de ville de La Seyne, janvier 1959

C’est en 1950 qu’il est élu pour la première fois Conseiller municipal de La Seyne et qu’il devient aussi Président de la Caisse des Écoles. Adjoint au Maire de La Seyne en 1959, il est notamment chargé des œuvres sociales scolaires : création des restaurants scolaires, équipement des écoliers et étudiants en fournitures diverses, acquisition de propriétés à usage de colonies de vacances et de classes de neige, organisation de centres aérés, de classes de plein air, de cours de moniteurs, organisation de fêtes scolaires de masse, d'expositions de travaux d'élèves, de cours d'alphabétisation,... En 1976, lorsque Marius Autran fut promu officier des palmes académiques, l'inspecteur estima qu'il avait contribué « au puissant essor des œuvres sociales et activités qui gravitent autour de l'école, notamment aux cantines scolaires et aux classes de neige ».

En 1972, la rédaction du Bulletin municipal lui est confiée. Dans le cadre de ses fonctions municipales, il représente souvent la ville, notamment lors du jumelage avec la ville soviétique de Berdiansk. Désigné comme conseiller régional en 1974, il devient le secrétaire de la commission de l'Éducation nationale, des Sports et des Affaires culturelles.

En mars 1977, Marius Autran décide de ne plus se représenter aux élections municipales et remet son mandat de conseiller régional. Quelques mois plus tard, il est fait Adjoint au Maire honoraire. C’est cependant vers cette époque qu’il commence à se détacher du Parti communiste, qu’il quitte définitivement en 1985, suite à des désaccords sur des questions nationales (participation de ministres communistes au gouvernement) et locales (choix fédéraux concernant les dirigeants seynois).


L’historien local

À 70 ans, retraité de l'école publique et de la municipalité et retiré dans sa maison du quartier Châteaubanne, il ne manque pas de loisirs : pêche, chasse, jardinage de son bien du quartier Bastian, cueillette de champignons ou d’asperges sauvages en forêt de Janas… (autant d’activités qu’il a toujours su trouver le temps de pratiquer, même durant sa période d’activité professionnelle ou au plus fort de son engagement politique). C’est alors à cette époque qu’il entreprend d’écrire « pour partager les souvenirs qui faisaient de lui un témoin privilégié de la vie à La Seyne-sur-Mer durant presque tout le XXe siècle ».

Avec patience, rigueur, en même temps qu'avec le désir de s'amuser et d'amuser, avec aussi parfois le souci légitime de justifier son engagement politique et de contribuer à établir le bilan d'une action collective, il produit ainsi, en une vingtaine d’années, cette série de dix ouvrages qu'on appelle d'histoire locale :

- En 1982, une Histoire de l’École Martini, avec en annexe une Histoire de L’Enseignement à La Seyne de 1789 à 1980.
- En 1984, une Histoire de la Philharmonique Le Seynoise : Cent cinquante ans d’art musical à La  Seyne.
- Puis, entre 1987 et 2001, huit tomes d’une série intitulée Images de la vie seynoise d’antan et dont le sous-titre est : « Récits - Portraits - Souvenirs ».

Une cinquantaine de sujets ont été traités, couvrant des pans entiers de l’histoire de La Seyne. Des sites prestigieux : Sicié, Janas, Balaguier, la baie du Lazaret, l’isthme des Sablettes... Des lieux plus modestes mais chargés d’histoire : La place du marché, le quartier Beaussier, la ZUP de Berthe... Des souvenirs personnels : mon siècle avait dix ans... Des portraits : George Sand, Michel Pacha, Saturnin Fabre, Toussaint Merle... Des évènements dramatiques ou douloureux : la tragédie du cuirassé Liberté, les guerres, la Résistance, les bombardements... De grandes questions économiques et sociales : la construction navale, la vie maritime, les transports, les problèmes de l’eau, les toupines, les métiers d’autrefois, l’artisanat, l’immigration... L’histoire de la culture, du sport, des colonies de vacances, etc.

On peut dire que cet esprit humaniste, cette légende vivante, ce conteur-né, ce remarquable pédagogue, a donné grâce à ses ouvrages, les clés de sa ville, « non pas pour satisfaire un désir d’ostentation, mais, pour sauver de l'oubli un peu de cette mémoire collective sur laquelle repose notre conscience d'être Seynois ».

Marius Autran, 80 ans, historien local

Marius Autran ne s’est jamais prétendu historien car il travaillait beaucoup sur ses propres souvenirs sans toujours citer ses sources. On sait cependant combien les historiens apprécient ce genre d'ouvrages, ces récits, ces recueils de souvenirs, ces études sur des sujets en apparence mineurs, sur les mentalités qui ont valeur de témoignages et deviennent documents. Autant d'éléments chargés de sens, utiles, indispensables même à la véritable analyse historique.

Simultanément, Marius Autran poursuit une intense activité dans la vie associative locale puisqu’il accède à la Présidence d’Honneur de six associations : Philharmonique « La Seynoise », Société Nautique de la Petite Mer, Section locale des Anciens Combattants de la Résistance, Section locale de l'Association Républicaine des Anciens Combattants, Office Municipal de l'Action Socio-Éducative, Association des Anciens Élèves de l’École Martini. Il y retrouve partout des anciens élèves devenus à leur tour des retraités qui viennent toujours l'écouter attentivement.

Son dernier livre publié en 2001 - il a 91 ans -, il se consacre à la rédaction de biographies familiales. La même année, un site internet lui est ouvert (http://jcautran.free.fr) par son fils Jean-Claude, pour héberger la totalité de son œuvre, ainsi que de nombreux documents d’histoire locale et d’archives familiales.

Marius Autran ne quitte alors plus guère sa maison et son jardin du quartier Châteaubanne et vit ses dernières années au milieu de sa famille et de ses vieux amis. Il s’éteint le 20 janvier 2007, à l’aube de ses 97 ans.



Jean-Claude AUTRAN, juin 2011





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