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de l'Histoire de l'École Martini
Marius AUTRAN
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Histoire de l'École Martini (1982)
L'enseignement à La Seyne-sur-Mer (1789-1980)
CHAPITRE HUITIÈME :
La Libération
(Texte intégral du chapitre)

 

 

Au moment de la libération de notre ville, la plupart des édiles mis en place par Vichy s'étaient enfuis. Ceux qui ne quittèrent pas leur poste furent arrêtés comme collaborateurs de l'ennemi. Le Maire Galissard était de ceux-là.

Quand les Allemands furent définitivement chassés, quand Toulon fut libéré et que les derniers îlots de résistance, dont le Fort Napoléon, furent réduits au silence, les Seynois revinrent peu à peu reprendre leurs activités.

Les conditions de vie étaient alors extrêmement précaires.

Les réseaux d'eau, d'électricité, du téléphone, avaient été en grande partie détruits. Le ravitaillement, très difficile à effectuer depuis des années, n'allait pas s'améliorer rapidement. C'est ainsi que nous vîmes réapparaître pour quelque temps encore, les tickets d'alimentation de triste mémoire.

Mais nous espérions la fin de la guerre pour bientôt.

La défaite allemande se précipitait. Les armées alliées remontaient la vallée du Rhône et les Alpes. Le danger des bombardements n'était plus tellement à craindre. La vie allait renaître. Il faudrait certes se mettre au travail pour reconstruire, pour réparer et pour produire.

Chacun comprendrait mieux, du moins, nous l'espérions, les devoirs de solidarité qui devaient animer toute la population.

Au fur et à mesure du retour de nos concitoyens, l'enthousiasme renaissait ; un courant d'union populaire se manifestait pour surmonter toutes les épreuves.

Au mois de septembre, une délégation municipale provisoire fut mise en place par un arrêté préfectoral signé de M. Sarie, Préfet du Var. Cette délégation avait été désignée en accord avec le Comité Départemental de Libération. Elle avait à sa tête Pierre Fraysse et elle siégea de 1944 à 1945.

De par son caractère provisoire, cette délégation ne pouvait envisager la solution des grands problèmes qui se posaient à notre Ville en ruines.

Elle eut donc la charge de préparer les élections municipales aux cours desquelles, en 1945, fut élue la liste d'union des organisations de la Résistance, conduite par le Docteur Sauvet.

Sur cette liste, le Mouvement de Libération Nationale, le Front National, les Catholiques Résistants, le Parti Communiste Français, la Confédération Générale du Travail y étaient représentés en fonction de leur influence.

Seul, le Parti Socialiste refusa de s'associer à ce courant d'union populaire, pourtant si nécessaire pour contrecarrer les entreprises de sabotage de la République renaissante.

La Municipalité présidée par le Docteur Sauvet désigna le mécanicien Paul Pratali comme Premier Adjoint et Pierre Fraysse au poste d'Adjoint délégué à l'Instruction publique.

Nos édiles accomplirent leur tâche avec beaucoup de dévouement et de compétence dans des circonstances particulièrement difficiles.

Deux ans plus tard, cette municipalité fut remplacée par une autre, à majorité communiste et conduite par Toussaint Merle, avec Léon Mary comme Premier Adjoint. Pierre Fraysse demeura Adjoint délégué à l'Instruction publique.

À ce poste, il se dépensa ardemment pour équiper nos écoliers, activer les réparations, exiger la modernisation et le développement de l'Enseignement dans nos écoles, par la création de classes de latin et de classes de préparation au baccalauréat.

Malheureusement, en 1950, il trouva la mort dans un accident d'automobile. Ancien Résistant, militant infatigable de l'École laïque, créateur et animateur de nombreux groupements, Pierre Fraysse avait déployé une activité débordante au service des idées de progrès. Des milliers de nos concitoyens lui rendirent un hommage émouvant car il a laissé un souvenir vivace dans notre cité.

Il fut remplacé dans ses fonctions par Alex Peiré, ingénieur géomètre.

Mais revenons à cette période dite de la Reconstruction.

Il n'était pas possible de réaliser encore de grands projets dans le domaine scolaire. Certes, il fallait bien les envisager, penser aux acquisitions de terrains, formalités parfois très longues, mais dans l'immédiat, les problèmes les plus urgents à résoudre étaient ceux de l'accueil des enfants

La Municipalité se mit en devoir de préparer entre autres tâches les rentrées scolaires aussi correctement que possible.

Mais il y avait tout à faire : réparer les routes, les canalisations, rétablir le courant électrique, les conduites de gaz, loger les sinistrés, etc.

Nos chantiers de construction navale avaient été minés par les troupes allemandes avant leur départ, ainsi que les quais du port.

Des explosions d'une rare intensité avaient détruit les grues, les ateliers et si le pont levant fut épargné, c'est vraisemblablement grâce à l'intervention des Résistants postés dans le Jardin de la Ville et à l'intérieur des chantiers, qui empêchèrent la mise à feu des charges explosives.

Les écoles sinistrées, quelquefois même pillées, n'avaient plus leur équipement pédagogique complet. Il fallut travailler avec des moyens de fortune, clouer des rectangles de carton pour remplacer les carreaux brisés, rajuster des tuyaux de poêle trouvés dans les décombres. Il arriva même que des enfants de la campagne apportent leur bûche pour se chauffer, comme cela se faisait autrefois. Les maîtres et les maîtresses confectionnaient eux-mêmes leur matériel d'enseignement.

Les locaux publics les moins endommagés, comme la Bourse du Travail ou les bâtiments anciens de la rue Messine, furent utilisés comme classes de fortune. Les abords de la Bourse du Travail faisaient office de cour de récréation, ce qui veut dire que la surveillance n'en était pas aisée.

Tous les écoliers n'étaient pas rentrés en octobre 1944.

Certains, parmi ceux qui avaient été évacués dans l'Isère ou en Ardèche, prolongèrent leur séjour.

Malgré cela, les classes étaient surchargées. Des maternelles et même des cours préparatoires reçurent jusqu'à SOIXANTE-DIX élèves.

Comment dispenser un enseignement valable dans ces conditions ? Et cependant, chacun trouvait le courage d'accomplir sa tâche.

Nos alliés américains, en fait les affairistes U.S., proposèrent alors à la France des éléments préfabriqués à usage d'écoles ou de services publics.

Notre ville en reçut un nombre assez important qui permit d'équiper l'École des Sablettes, des écoles aux Plaines et au quartier Berthe récemment ouvertes, l'École Ernest Renan, qui devait fonctionner sur l'emplacement du patronage laïque détruit, l'École Jean Jaurès, l'Hôpital de La Seyne, où furent aménagés des dortoirs pour les personnes âgées.

L'Administration avait affirmé à la Municipalité que ces préfabriqués étaient offerts gracieusement en compensation des dommages causés par les bombardements. Affirmation toute gratuite.

Dix ans plus tard, la Préfecture envoyait une note dont j'ai oublié le montant, mais dont je me souviens de l'accueil qu'elle reçut auprès de Toussaint Merle, le Maire de La Seyne qui se fâcha tout rouge.

Le Ministère de l'Éducation avait affirmé aussi que ces, constructions provisoires seraient remplacées au bout de cinq ans par des constructions en dur. Certaines d'entre elles ont servi au moins vingt-cinq ans. C'est vraiment ce qu'on peut appeler du provisoire qui dure. Néanmoins, ces locaux embryonnaires permirent l'ouverture des écoles de quartiers, projets de la Municipalité d'avant-guerre qui furent élaborés en 1938 et ne virent pas le jour dans cette période, projets que la Municipalité Galissard examina sans trop de conviction, d'autant que son amour pour l'école laïque manquait pour le moins de chaleur...

Cette Municipalité avait tout de même eu une pensée émue pour notre vieille école Martini en reprenant la discussion sur l'expropriation Zunino.

Ah ! l'expropriation Zunino ! Pour nous détendre un peu, parlons-en en quelques mots.

Qu'est-ce que la propriété Zunino ? Tout simplement un terrain mitoyen au Sud de l'École Martini, placé entre la grande cour et l'actuel centre médico-scolaire. C'était le seul endroit utilisable pour un agrandissement éventuel des lieux, à condition, faut-il ajouter, de le vouloir vraiment.

Il faut remonter au 8 avril 1935 pour apprendre que la Municipalité délibéra dans le but de cette expropriation, dont l'ordonnance fut enregistrée un an après, le 7 avril 1936.

Puis, ce fut le silence absolu sur cette affaire pendant sept ans. Elle reprit le 11 août 1942, date à laquelle Mme Veuve Zunino demanda à disposer de sa propriété que la ville n'avait pas utilisée.

La Municipalité aux ordres du gouvernement de Vichy examina la requête, estima que les dépenses à faire en faveur de l'Enseignement devaient être engagées, mais dans d'autres secteurs, aussi renonça-t-elle à l'agrandissement de Martini et permit à Mme Veuve Zunino d'obtenir satisfaction.

Trois années passèrent. La propriétaire attendait toujours l'acheteur idéal. Nous en étions revenus à la situation d'avant 1935.

Si la procédure d'expropriation avait été appliquée à l'époque, c'est parce que les propriétaires avaient refusé l'entente à l'amiable, jugeant insuffisante l'évaluation du terrain.

Qu'allait-il se passer ?

La Municipalité Galissard dispersée laissa la place à celle de la Libération présidée par le Docteur Sauvet.

Le 18 avril 1945, cette dernière reprit la procédure d'expropriation qui deviendra effective le 18 août 1947, l'indemnité ayant été fixée à 1 250 000 F.

La Municipalité Sauvet étant remplacée le 27 octobre de la même année par celle conduite par Toussaint Merle, la nouvelle équipe s'attaqua aussitôt avec acharnement aux problèmes de l'Enseignement.

La question de l'agrandissement du Collège Martini fut réexaminée, mais il tombait sous le sens que des constructions édifiées au sud de l'édifice l'auraient rendu encore plus monstrueux du fait qu'il n'était plus, déjà, qu'un ensemble disparate de locaux qui s'ajoutaient, qui s'étageaient à des niveaux différents depuis plus d'un siècle.

La municipalité Toussaint Merle projeta la construction à la périphérie de la ville, d'un collège moderne et technique, répondant aux nécessités d'un enseignement de valeur et digne de La Seyne.

Le terrain Zunino fut alors utilisé pour la construction de logements d'accueil d'urgence.

Les vingt années qui vont suivre, comme nous pourrons vous l'expliquer, vont être décisives pour la solution des problèmes de l'enseignement à La Seyne.

Mais pour l'instant, revenons aux années 1944 à 1950, c'est-à-dire aux années de la Libération.

 

Les années 1940-1950

Chef du Gouvernement provisoire à Alger, puis à Paris, le Général de Gaulle préside alors aux destinées de la France (1).

(1) Gaulle (Charles, André, Joseph, Marie, de) - 1890-1970 - Issu d'une famille catholique, libérale et cultivée, il s'oriente vers la carrière militaire. Reçu à Saint-Cyr, il est affecté à sa sortie de l'école au 33° régiment commandé par le Colonel Pétain. En 1916, il est fait prisonnier. Libéré, il participe à la guerre de la Pologne contre la Russie soviétique en 1920. Il occupa ensuite des postes importants dans l'Armée ou au gouvernement ou il est, en 1925, membre du cabinet de Pétain. Plus que par son activité militaire, Charles de Gaulle se fait alors connaître par ses écrits d'histoire politique : Le fil de l'épée, ou de stratégie militaire Vers l'armée de métier. Il fut dans les premiers à préconiser une armée motorisée et blindée. Il ne fut pas compris alors par les dirigeants militaires de l'époque, mais reçut l'appui de Paul Reynaud qui le nomma à la tête de la 4ème division cuirassée au début de la seconde guerre mondiale. Il mena alors quelques contre-offensives et fut promu général de brigade à titre temporaire. Appelé par P. Reynaud le 6 Juin 1940 comme sous-secrétaire à la Défense nationale, il se montra déterminé à la poursuite de la guerre. Il rencontra l'opposition des partisans de l'armistice - Weygand, Pétain- et, le 17 juin, il gagna Londres, après que Pétain ait formé son cabinet et lança, le 18 juin, son fameux Appel pour la continuation de la lutte. Il organisa alors les Forces Françaises Libres tout en cherchant à diriger et à coordonner l'action de la Résistance. Ses efforts aboutirent à la création du Conseil National de la Résistance à l'instigation de Jean Moulin. Soutenu par Staline dès le début, De Gaulle se heurta à la méfiance de Roosevelt qui reconnaissait l'autorité du Général Giraud. De Gaulle, parvenant à éliminer ce dernier, prendra la tête du Comité français de libération nationale.
Lors du débarquement allié, il arriva à Paris en chef incontesté, rétablissant le pouvoir central, faisant dissoudre les milices patriotiques et reconstituer l'armée française pour participer aux combats de libération aux côtés des Anglo-Américains. En novembre 1945, il fut choisi par l'Assemblée nationale constituante comme président du Gouvernement provisoire ; craignant de retomber dans le parlementarisme de la IIIe république, il proposa un renforcement du pouvoir exécutif. Il se heurta à l'opposition des socialistes et des communistes et démissionna dès le mois de janvier 1946. Il voyagea, publia des ouvrages, mais surtout créa le Rassemblement du Peuple Français qui se voulait union des Français au-dessus des partis. En fait, il ne fut qu'un parti supplémentaire, accroissant l'instabilité des institutions de la IVe République. En 1958, la tension s'accroît en France à propos de la guerre d'Algérie et de Gaulle est présenté comme le sauveur ; il fut appelé par le Président Coty pour faire face à une situation comportant la propagation de rumeurs de guerre civile et de dictature militaire. Le 11 juin, en dépit de l'opposition des partis de gauche, de Gaulle fut investi pour six mois des pleins pouvoirs. Il fit approuver par référendum une nouvelle constitution qui instaurait en France un régime présidentiel marqué par un net renforcement du pouvoir du Chef de l'État.
Élu en décembre 1958 Président de la République, il prit Michel Debré comme Premier ministre.
Après avoir penché pour les thèses des partisans de l'Algérie française, il opta pour l'autodétermination qui aboutit aux accords d'Evian en mars 1962.
De 1962 à 1968, avec le gouvernement Georges Pompidou, il s'attacha à pratiquer une politique extérieure exprimant l'indépendance de la France et visant à rapprocher l'Est et l'Ouest en pleine guerre froide et à se réconcilier avec l'Allemagne. Il mena une politique de prestige qui n'alla pas sans difficultés sociales, économiques et financières. De Gaulle dut faire face à une opposition politique et syndicale qui s'exprima une première fois avec l'élection présidentielle au Suffrage universel lors de laquelle le Général fut mis en ballottage par le candidat de Gauche, François Mitterrand (1965). En 1967, la majorité gaulliste enregistra un recul aux législatives puis, le malaise économique, social et culturel de la France éclata en mai 1968. Il enraya le processus lors des législatives qui suivirent, mais lors d'un référendum sur un double projet de réforme du Sénat et de régionalisation, projet qui fut repoussé par 52,5 % de " non ", Charles de Gaulle abandonna le Pouvoir.
Ainsi prit fin la carrière politique d'un homme certain d'avoir été investi par l'Histoire d'une mission exceptionnelle.

La guerre n'est pas terminée, même après la libération de Paris en août 1944. Mais les anciens occupants sont repoussés vers les frontières de l'Est.

Le régime républicain proclamé en Afrique du Nord par le Gouvernement d'Alger est rétabli sur tout le territoire au fur et à mesure de sa libération. Toute la législation scolaire anti-laïque du gouvernement de Vichy est alors abolie. Les professeurs de l'École Martini qui avaient été révoqués, purent réintégrer leur poste.

C'est alors que nous apprîmes que le jeune instituteur de l'école Primaire Van der Saeck fut tué au cours des combats de Libération en Tunisie. Cela nous attrista vraiment. Quoiqu'il restât peu dans notre école, il avait su, par sa gentillesse et son dévouement, conquérir la sympathie de tous ses collègues.

Les structures, les organisations laïques, furent vite reconstituées. Mais le plus urgent à obtenir, c'étaient les crédits pour réparer et pour reconstruire.

Certes, pour nous en tenir à l'exemple seynois, la Municipalité fit le maximum pour les travaux de première urgence : obtenir au moins la mise hors d'eau des bâtiments, remplacer les carreaux brisés, chauffer les locaux, etc.

Mais pour reconstruire des écoles entièrement détruites, comme l'École des Sablettes, ou la Maternelle Jean Jaurès, la Ville ne pouvait pas prendre toutes les dépenses à sa charge.

Et puis il fallait penser à l'avenir. Il n'était plus possible de continuer à accueillir nos jeunes gens dans des locaux vétustes, branlants, inconfortables à tous les égards et inadaptés aux enseignements moderne ou technique.

Il fallait donc un collège moderne, technique et même classique, car le problème se posait avec une acuité croissante de nos jeunes seynois devant aller à Toulon recevoir un enseignement que nous aurions pu dispenser sur place.

Il serait bien difficile de raconter par le menu toutes les réunions, toutes les interventions, toutes les correspondances intervenues pour réaliser des projets d'importance.

Dans la seconde partie de cet ouvrage, nous montrerons de façon plus précise ce qu'était à la Libération la situation d'ensemble de l'enseignement à la Seyne. Pour l'instant, nous nous en tiendrons à la seule École Martini, dont la situation devenait préoccupante chaque année un peu plus.

La délégation municipale provisoire mise en place le 26 septembre 1944 se préoccupa immédiatement de l'enseignement au collège. Elle délibéra pour la création d'une classe de Seconde Moderne, mais cette proposition ne fut pas reconnue tout de suite, loin s'en faut, par l'administration de l'Éducation nationale.

Le 30 décembre de la même année, la délégation vota un crédit de trente mille francs pour assurer des heures supplémentaires aux Professeurs auxiliaires qui enseigneront les Mathématiques en classe de seconde moderne.

Le 18 avril 1945, la Municipalité Sauvet récemment élue, demanda la création d'une classe mixte de plein exercice, pour la préparation au baccalauréat. Elle vota encore cinq heures supplémentaires pour le fonctionnement de la classe de seconde.

Nous verrons comment, avec la municipalité Toussaint Merle, ce problème des classes de préparation au baccalauréat sera résolu.

La vieille École Primaire Supérieure Martini avait alors quelque peu progressé.

Par la loi du 15 août 1941, elle était devenue, nous en avons parlé, un Collège moderne et technique, mais ce ne sera que le 5 décembre 1946 qu'elle recevra sa forme administrative de collège communal mixte, avec section technique, par l'adoption d'un traité constitutif.

Celui-ci précise que la Ville doit se charger :

- Du logement du Principal - on ne dit plus le Directeur
- Des traitements et indemnités du concierge et du personnel de service
- De l'entretien du matériel scientifique et des collections.
- De l'entretien des ateliers.
- Du chauffage, de l'éclairage, des frais de bureau, etc. etc.

Que reste-t-il à la charge de l'État ? Le traitement des professeurs.

On mesure déjà l'effort que la Ville devait consentir pour assurer le fonctionnement du Collège.

À partir de 1945, il existera une classe de Seconde Moderne qui fonctionnera avec dix élèves. En 1946, l'effectif sera de vingt-huit élèves. Mais avant la reconnaissance de cette classe par l'Administration de l'Éducation nationale, c'est la Ville qui paiera les heures effectuées par les professeurs.

Sur le plan national, l'École laïque végète. Le Général de Gaulle avait bien proclamé dans un discours officiel " Honneur à la Ligue de l'Enseignement ! ". Le moyen le plus sûr d'honorer cet organisme et l'enseignement qu'il défendait depuis plus de soixante ans eût été d'accorder à l'école publique les crédits qui lui faisaient cruellement défaut.

Or, non seulement l'école laïque ne reprenait pas tous ses droits, mais on aurait dit qu'une sorte de guerre froide se déclenchait contre elle.

Au sein du gouvernement provisoire, comme au sein de l'Assemblée, l'unanimité ne se fit pas sur les problèmes de l'Enseignement.

Se reposa la question des subventions aux écoles privées et l'on sentit très bien que le conflit entre l'école publique et ses adversaires allait renaître.

Une commission, présidée par le Professeur Langevin fut créée dans le but de mettre au point un projet de réforme de l'Enseignement. Puis il fut décidé que l'ensemble des problèmes scolaires serait examiné devant une autre commission présidée par le socialiste André Philip, ancien membre du gouvernement d'Alger. Les débats de cette commission se prolongèrent, les semaines et les mois se succédaient ; toutes les discussions s'achevaient dans la stérilité.

Année 1947 - Classe de M. Vacchero
Elèves identifiés par M. Jacques Girault : (de gauche à droite)
Rang du haut : Bonnarié, Di Silvestro, Jardet, Merenda, Selveta (Mocera ?), ?, Castillo, Mirabeau, ?, ?, Romano, Abonna, Castillo (Carignan ?)
Rang du milieu : Urri, Barbier, Girault, Jauffret, Ciarle, Boeri, Unri, Laure ?, Petit, Stefannini, Mateucci, Garaudy, Trille
Rang du bas : Jalbot, ?, ?, Le Guen, Allons, Kolesnikoff, Zunino, Davin,  Guieu, ?, Ribet,  Zunino, Bertolotto,  Penon

Année scolaire 1946-1947 - Cours élémentaire
On reconnaît en haut, deuxième en partant de la droite, Maurice Blanc, qui sera Maire de La Seyne de 1978 à 1983

Année scolaire 1947-1948
Cours moyen 2e Année - Classe de Mme Arnaud : En haut et à gauche, notre concitoyen Henri Tisot
Photo de l'Avis de Recherches pour l'émission télévisée du 16 Octobre 1981.
De gauche à droite :
En haut : Henri Tisot, Augustin Isnard, Hubert Galaurchi, Clairin Bonnardel, Marcel Lungari, Georges Fresquin, Sebert, Robert Franchelo, Pierre Rigotti, Antoine Erutti.
Au milieu : Jean-Pierre Christol, Henri Dalen, Jean Grimaud, Philippe Gabrielli ?, Henri Pietri, Robert Terlay, Guy Boillon, Paul Bardiani, Georges Zunino, Gaston Lavato.
Assis : Pierre Julien, Jacques Zampatti, Leguen, Henri Pradier, Marcel Zadigan, Georges Borda, Jean Rinaldi, Jacques Jaubert, Jean Julien

L'École Laïque ne reprend pas tous ses droits

À partir de là, on pouvait craindre que la guerre scolaire ne se rallumât tôt ou tard.

Le mécontentement du corps enseignant à tous les niveaux, grandissait.

Était-il concevable que dans le pays qui avait donné des Langevin, des Joliot-Curie, des Berthelot, des Perrin et combien d'autres, les crédits pour la recherche scientifique soient aussi ridicules qu'ils l'étaient alors. La France manquait de maîtres. Les écoles normales avaient été rétablies, mais le nombre d'élèves par promotion était sensiblement le même qu'avant la guerre. Or nous entrions dans une période de hausse de la natalité ; on enregistrait 620 000 naissances en 1946 et 830 000 en 1947. Il n'était pas possible de continuer ainsi.

Si un programme de constructions d'écoles n'était pas rapidement réalisé, le principe de l'obligation scolaire ne pourrait plus être respecté.

L'année 1947 fut néfaste pour notre pays. Les événements qui allaient se dérouler ne pouvaient pas créer de bonnes conditions pour la défense de l'école laïque.

La guerre faisait rage en Indochine depuis le mois de mars. Le Gouvernement de l'époque, présidé par M. Ramadier, ne voulut pas régler le problème par la négociation, comme le bon sens le commandait. Le Parti Communiste entra en conflit avec le pouvoir. Ses ministres furent exclus du gouvernement.

À partir de là, des conditions nouvelles allaient se créer. Le M.R.P., Mouvement Républicain Populaire, parti auquel le Vatican réservait ses faveurs, allait faciliter une nouvelle offensive contre l'école laïque.

Par le seul fait que la politique de guerre s'intensifiait, les crédits nécessaires pour l'École faisaient cruellement défaut. Le budget des années 1947 à 1950 consacra en moyenne 29 % des crédits aux dépenses militaires. En contre point, citons des chiffres qui se passent de commentaires : en 1948, sur 40 000 dossiers de reconstruction d'établissements scolaires publics, 171 seulement furent retenus en vue de leur réalisation.

Joliot-Curie (2) qui s'acharnait à obtenir des crédits pour la Recherche Scientifique déclarait : " Avec le prix d'un seul croiseur de bataille, on pourrait construire dix instituts de recherche, où l'on réussirait à vaincre les grands fléaux comme le cancer, la tuberculose, et l'on pourrait les faire fonctionner plus d'un siècle ".

(2) Joliot-Curie (Irène) (1897-1956), fille de Pierre et Marie Curie - Joliot (Frédéric) (1900-1958) : Physicienne et physicien français, ils effectuèrent des recherches de physique atomique à la Libération, Frédéric Joliot-Curie, nommé Haut-commissaire à l'Energie atomique, dirigea la première construction d'une pile atomique française. Membre actif du Parti Communiste Français, il fut élu président du Conseil mondial de la Paix, Irène Joliot-Curie fut sous secrétaire d'état à la Recherche scientifique (1936) et directrice de l'Institut du Radium (1946) - Frédéric, Académie des sciences en 1943 - Irène et Frédéric, Prix Nobel de chimie en 1935.

Nous avons vu quels étaient les besoins impérieux de notre Ville de La Seyne en matière d'enseignements avec toutes nos écoles sinistrées dont certaines entièrement détruites.

Combien, dans la France entière, de villes sinistrées comme la nôtre attendaient des solutions urgentes ! Combien de localités où l'on ne pouvait recevoir tous les enfants d'âge scolaire !

Que dire alors des maternelles, dont l'enseignement, considéré comme facultatif, qui ne recevaient qu'une minorité d'enfants. Les statistiques officielles au plan national donnaient 4 909 classes détruites, 1 058 classes endommagées, l'effort à faire était donc immense, ne serait-ce que pour retrouver des locaux anciens. Mais il fallait bien penser à moderniser et agrandir en raison de la croissance des effectifs.

Le gouvernement de Vichy, lui, pendant son passage, avait bien trouvé les milliards nécessaires à l'entretien et au développement de l'Enseignement privé confessionnel ; la Quatrième République, avec sa majorité de gauche ne serait-elle pas capable de défendre l'École laïque ?

 

Luttes sévères pour la défense de l'École

Alors une protestation à l'échelle nationale s'organisa.

Toutes les organisations laïques, les syndicats, les délégations cantonales, les Associations de parents d'élèves conjuguèrent leurs efforts.

Leur volonté de défendre l'école publique et de la développer fut renforcée à partir de la parution du fameux décret Poinso-Chapuis, favorisant l'octroi de subventions aux écoles privées.

Ici, une précision doit être apportée à ce sujet. Le député Garaudy ayant déposé à la Commission de l'Éducation Nationale une demande d'abrogation, celle-ci fut repoussée par trente voix contre treize.

Aussitôt après, le décret fut approuvé à l'Assemblée nationale, par 465 voix contre 192. Parmi ces 192 voix, il y avait toutes celles des communistes et quelques voix socialistes. Malheureusement, de nombreuses voix socialistes se mêlèrent à celles du M.R.P.

À La Seyne, comme à travers toute la France, une vaste campagne en faveur de l'école publique fut organisée. Une immense majorité des enseignants y prit part.

Des stands de signatures furent organisés partout. Les militants de l'école laïque, des enseignants, effectuaient chaque soir un porte-à-porte pour faire signer des pétitions.

En quelques jours, la population seynoise, à l'avant-garde du département du Var, recueillit dix mille signatures.

Cette campagne de protestations fut couronnée par la tenue, à Paris, le 18 juillet 1948, des États Généraux de la France laïque.

La riposte aux attaques contre la laïcité fut d'envergure nationale. Les motions adoptées demandaient, exigeaient, même :

- L'abrogation du décret du 10 juin 1948 (Poinso-Chapuis)
- Un large programme de constructions scolaires financé par la réduction des crédits militaires
- L'élaboration d'un programme de recrutement des maîtres : 50 000 instituteurs, 10 000 professeurs du second degré, 10 000 professeurs d'enseignement technique. Tout cela à réaliser dans les cinq années.
- La revalorisation des traitements
- La suppression des subventions aux organismes d'activités post-et péri-scolaires non laïcs
- Le respect de la règle de Jules Ferry qui demandait à l'Etat et aux collectivités locales de consacrer un sixième de leur budget à l'école publique.

La campagne de défense de l'école publique, malgré son exceptionnelle amplitude, n'atteignit que des objectifs limités.

Quelques crédits supplémentaires furent obtenus pour réparer les sinistres, mais ils demeuraient très insuffisants.

Les projets de constructions scolaires seront freinés. Les plans rarement conformes aux désirs d'une administration qui exigeait qu'ils soient repris, amenuisait les financements et laissait s'écouler les mois sans que rien ou presque ne se fasse.

Nous pouvons parler avec précision de cette période néfaste pour notre enseignement à La Seyne.

La Ville a-t-elle trouvé un terrain propice à la construction d'une école ? L'administration le refuse pour des motifs divers... mais elle se garde bien d'en proposer un autre.

Ce fut le cas pour la reconstruction de l'école des Sablettes pour laquelle une expropriation fut nécessaire. Il fallut plusieurs mois pour obtenir l'agrément d'un terrain.

La construction du groupe scolaire Ernest Renan fut approuvée par le Ministre le 26 février 1948. Les complexités administratives furent telles que la Municipalité délibéra plusieurs années sur ce même projet. Les plans furent arrêtés, mais les subventions retardées. En définitive, le premier acompte versé à l'entreprise responsable de l'ouvrage ne se fera que le 18 mars 1955... SEPT ANS plus tard !

Un autre exemple est mémorable pour les édiles de cette époque ; la création de l'École de Plein Air de la Dominante.

Aucun établissement de ce genre n'existait dans le Département. Cette innovation ne fut-elle pas du goût de l'Administration ? Il ne fallut pas moins de six ans de formalités et d'interventions pour aboutir à l'ouverture de l'école, le 7 janvier 1957.

Il ne s'agissait pas d'une construction neuve. Il fallait simplement transformer une grande maison d'habitation, admirablement située et achetée par la Ville.

Pour le début, il fallait installer deux classes, une salle d'eau une bibliothèque, une salle de repos, une cuisine et un réfectoire.

Les obstacles furent tels que le Maire Toussaint Merle dut faire appel à des artisans compréhensifs qui travaillèrent bénévolement pendant plusieurs semaines jusqu'à l'achèvement des travaux. Ainsi seulement les saboteurs furent mis en échec.

Mais que devenait notre École Martini dans cette période difficile ?

Elle accusait alors 114 ans de fonctionnement. Elle n'avait jamais connu de grandes transformations et il semblait peu probable que l'on pût la moderniser pour en faire une structure d'enseignement valable.

Dans cette période d'austérité pour l'enseignement, il fallait bien tirer parti des vieux locaux.

Qui aurait pu alors imaginer qu'elle rendrait encore de grands services pendant trente ans ?

Elèves des classes de Sixième et de Cinquième* Moderne de l'année 1945-1946 - On reconnaît notamment (de gauche à droite) :
En haut (debout sur le banc) : Alfred Mattéodo, Joseph Césana, Pierre Arnéodo, André Lovisolo, Alexandre Revest, Paul Fagni, Garcin, Constans Knight, Taramasco, Valadji
Debout sur le sol : Gally, Pierre Ferri, ?, Joseph Norgari, Rey ?, Marius Autran, Rey ??, Eucalipto, ?, Louis Morelli, Bruzzone, Julien
Assis sur le banc : Bracco, Constant Gianni, Roger Molinari, Claude Arnaud, Louis Norgari, Ravel, Paul Constant, Jacques Arnaud, Emile Rencurel
Assis sur le sol : Aurens, Maurice Bressan, Guy Lovisolo, Marcel Milanese, Michel Laure, Frédéric Suzan, Albert Cochaud

* Cette photo a été utilisée sur la page de couverture de l'Histoire de l'Ecole Martini (1982) avec la légende « Classe de 6e Moderne - Année 1946 ». Suite à une discussion avec M. Guy Lovisolo, qui se trouve sur la photo, avec son frère André, ainsi qu'avec M. Louis Morelli, il est apparu impossible qu'il s'agisse d'une classe de 6e. M. Guy Lovisolo était en effet en 6e avec Marius Autran en 1943-1944 (1er trimestre seulement, puisque la majorité de la population avait été évacuée ensuite en raison des bombardements), et n'était pas encore revenu à à La Seyne en 1944-1945. Mais il était rentré en cinquième en 1945-1946, puis en quatrième en 1946-1947. M. Louis Morelli a confirmé qu'il s'agissait d'un groupe d'élèves venant de la classe de 6e et de la classe de 5e de l'année 1945-1946. Les noms des élèves indiqués ci-dessus avaient été retrouvés en partie par Marius Autran en 2001, puis complétés par M. Guy Lovisolo en novembre 2009 et par M. Louis Morelli en février 2010.

La situation de l'École Martini dans les années 1947-1950

Dans cette période, les structures pédagogiques se présentent ainsi : Le Moderne fonctionne avec cinq divisions - il y en avait trois en 1900, trois en 1920 et quatre en 1928. La classe de Sixième moderne dont l'effectif dépasse souvent la quarantaine d'élèves est suivie d'une Cinquième, d'une quatrième, d'une Troisième et d'une classe de Seconde. Cette dernière ne fonctionne que grâce à des heures supplémentaires payées par la Ville. L'effectif de la classe de Sixième moderne voisinant les cinquante élèves à la rentrée d'octobre 1951, il fut décidé de la dédoubler. Cela donna alors une Sixième " A " et une Sixième " B " accueillant respectivement 26 et 25 élèves.

L'organisation de la section technique est similaire avec quatre divisions seulement. Le Ministère de l'Education nationale, et cela corrobore la politique de freinage soulignée précédemment, ne reconnaît pas la classe de Seconde moderne qui doit devenir normalement une classe de Première l'année suivante.

À la section de juillet du baccalauréat, l'école comptera sept reçus : Ce chiffre peut paraître ridicule à certains, mais qu'ils comprennent bien cependant que ce fut un résultat appréciable parce qu'il apportait la preuve évidente des capacités intellectuelles des jeunes Seynois et de la valeur de l'enseignement qu'ils recevaient.

Mais surtout, la démonstration fut ainsi faite aux autorités académiques que l'on pouvait avoir à La Seyne des structures pédagogiques qu'il n'était pas nécessaire d'aller chercher dans la ville voisine.

On commençait à parler de l'enseignement classique.

Les familles seynoises désireuses de faire étudier à leurs enfants les langues grecque et latine, étaient dans l'obligation de les orienter vers le lycée de Toulon.

Soucieuse de satisfaire aux besoins nouveaux, les Municipalités de la Libération œuvrèrent pour que le collège moderne et technique soit complété par le volet manquant, c'est-à-dire l'Enseignement classique.

Les délibérations demandant sa prise en charge par l'État demeurant lettre morte, il fut décidé que cet enseignement lui aussi serait financé par la Ville... en attendant une meilleure compréhension des ministres de la IVe République.

À force de réclamations, d'explications, de protestations, le Ministre de l'Éducation nationale finit par accepter le principe de la création d'une Première moderne. Mais s'il fut d'accord sur le principe du fonctionnement, il fut moins pressé pour le financement. La classe nouvelle exigeait la création d'heures supplémentaires ; vingt-trois heures et demie, exactement. Soucieuse de ne pas voir les jeunes Seynois aller préparer leur Baccalauréat à Toulon, la Municipalité accepta de payer ces heures.

De leur côté M. Malsert, Directeur du Collège et M. Baude, Chef de travaux de la section technique, se démenaient pour faire face à une situation qui évoluait rapidement.

Les effectifs s'accroissaient parce que la population augmentait. Les quartiers de la Seyne se développaient et la ville se reconstruisait rapidement.

Une autre salle de dessin industriel était nécessaire. La Municipalité accepta de la construire au-dessus de la vieille chaudronnerie datant du début du siècle.

En 1948, il fallut absolument agrandir l'atelier d'ajustage. On utilisera un hangar et une cour intérieure du côté du presbytère. C'est le seul endroit où il restait quelques mètres carrés de terrain disponibles.

Puis un effort particulièrement important sera consenti par la Ville pour équiper la section technique en matériel ; achat d'une perceuse, d'un tour supplémentaire, d'un étau-limeur, d'un moteur électrique, d'une machine à scier alternative et de diverses machines-outils.

L'année suivante, ce sont des problèmes pédagogiques qu'il faudra résoudre ; l'École Martini a besoin d'une troisième classe de Cinquième technique. En réalité, ces classes de Cinquième technique n'avaient pas d'existence officielle. Il existait des classes préparatoires où des instituteurs enseignaient sans même bénéficier d'une indemnité afférente à cette fonction. M. Malsert demandait l'intégration de ces classes dans la section technique. Dans le rapport qu'il fit au Ministère, il indiqua qu'en 1949, il y avait cent quarante-neuf candidats pour alimenter deux classes de Cinquième. Il fallait donc en créer une troisième, pour ne pas laisser des enfants à la rue.

Seule la Municipalité fit preuve de compréhension en acceptant, une fois de plus, de prendre en charge provisoirement le maître supplémentaire que nécessitait cette création.

Dans un autre rapport qu'il adressa au Ministère, M. Malsert demanda l'organisation d'un enseignement spécial pour l'obtention d'un C.A.P. de dessin. Il aurait été bien utile de créer un poste dans cette discipline. Aucune réponse ne parvint du Ministère. Pour cet enseignement spécial de préparation au C.A.P., il aurait fallu douze heures d'enseignement supplémentaire en Dessin industriel et en Mathématiques.

Le Ministère faisant la sourde oreille, M. Malsert se tourna alors vers la Municipalité qui accepta de prendre ces douze heures à sa charge, comme elle acceptera encore par la suite de payer des heures supplémentaires pour le fonctionnement de la Première technique.

Ainsi, on n'en finirait pas de multiplier les exemples de la carence ministérielle en matière d'Éducation nationale et son incidence sur les problèmes particuliers qui se posaient à La Seyne.

Nonobstant les difficultés de tous ordres, notre vieille École Martini poursuivait son œuvre. Son personnel enseignant - professeurs, instituteurs, maîtres auxiliaires et maîtres d'atelier - fit preuve d'une haute conscience professionnelle, malgré des conditions de travail défavorables.

Remarquons au passage que l'élément féminin se renforça dans les classes primaires et secondaires, sans que la discipline n'eut à en souffrir.

Il est vrai qu'avec un directeur omniprésent et dont l'autorité était admise de tous, l'établissement fonctionnait à la satisfaction générale.

Pour clore ce chapitre, citons quelques résultats aux examens recueillis dans les annales locales et concernant l'année scolaire 1948-1949.

Certificat d'Études primaires :

50 reçus

Concours d'entrée en 6ème moderne :

23 admis

Certificat d'Aptitude professionnelle :

20 admis

Brevet d'Enseignement industriel :

10 admis

Brevet d'Études du premier cycle :

8 reçus

École Normale d'Instituteurs (Var) :

1 succès

École Normale d'Instituteurs d'Aix :

3 succès

Baccalauréat 1ère partie :

14 admis

Ces chiffres attestent de la bonne vitalité de l'École Martini dont les succès iront croissant, jusqu'à ce qu'elle soit transférée, en 1960, au Lycée neuf du quartier Beaussier.

Le baccalauréat y sera préparé au complet (première et deuxième partie) avec les options Philosophie, Sciences expérimentales, Mathématiques élémentaires. L'effectif atteindra son apogée en 1959 avec 1.409 élèves.

Il faut noter cependant que depuis 1950, les classes primaires, tout en fonctionnant dans le même établissement, n'étaient plus dirigées par le Principal du Collège. Elles dépendaient d'un Directeur de l'Enseignement du Premier degré.

Dans cette période, la direction des classes primaires fut assurée par M. Longeon. Après le départ de M. Malsert, on en revint à la situation antérieure. Voulut-on avantager certain directeur ? Ce fut là un cas parmi tant d'autres d'un impondérable de l'Administration.

 

La situation politique s'aggrave dangereusement

À partir de 1949 s'instaure une période dite de guerre froide qui prend des proportions préoccupantes.

Tout porte alors à croire que les impérialistes sont prêts à ouvrir les hostilités à l'échelle mondiale. Vont-ils faire à nouveau usage de l'arme atomique qui a fait ses preuves horribles en 1945 ?

La guerre fait rage au Vietnam et en Corée. La France est engagée à fond dans la guerre coloniale. Les démocrates qui sont au pouvoir n'ont pas tenu compte des paroles sacrées de Jaurès qui condamna en son temps toute la malfaisance du capitalisme et du colonialisme.

En attendant, la guerre du Vietnam coûte à la France CENT-VINGT MILLIARDS par an. Des sommes folles seront gaspillées en armes, en munitions et en primes d'engagement pour les volontaires.

En 1950, la durée du service militaire est prolongée. Le Gouvernement Pleven annonce deux mille milliards supplémentaires pour sa politique de guerre. Parallèlement, il décide cinquante-trois milliards d'économies sur les budgets de la Santé publique et de l'Éducation nationale.

Dans l'ensemble du pays, les Municipalités protestent contre les réductions de crédits dans un moment où il faudrait au contraire augmenter les subventions de manière sensible.

C'est dans cette période cruciale que la Municipalité de La Seyne dépose un projet de construction de quatre classes au profit de l'École Martini. Les nouveaux bâtiments sont prévus en bordure de la rue Jacques Laurent (voir plan annexé au chapitre IX)

Si ce projet n'aboutit pas, l'école ne pourra plus fonctionner normalement. Il faut agir vite. Mais ce que la Municipalité ne perd pas de vue, c'est que dans le même temps, il faut agir très énergiquement contre la politique de guerre.

Elle répond à l'appel des partisans de la paix, qui se sont organisés à l'échelle mondiale et ont lancé le fameux Appel de Stockholm rédigé par le savant Frédéric Joliot-Curie.

La vaste campagne organisée contre la résurgence de la politique de guerre se concrétise par le Vote de la Paix. Des milliers de municipalités participèrent à cette campagne. Chez nous, 7.173 Seynois diront oui à la Paix.

Coupable d'avoir utilisé une salle de la Mairie de La Seyne, Toussaint Merle, sera suspendu de ses fonctions.

L'action de la municipalité, malgré les entraves ne se relâchera pas pour autant. La population travailleuse galvanisée par les mesures de répression de ce genre, répondra avec plus d'empressement encore à ses appels.

On peut se demander par quelle aberration des gouvernants dignes de ce nom en étaient venus à prendre des mesures aussi stupides.

Sanctionner un Maire parce qu'il a permis à ses concitoyens d'exprimer leur réprobation face à la guerre ! C'est vraiment un COMBLE !

De l'histoire de la IVe République, cette période restera peut-être la plus honteuse.

Nos concitoyens se souviennent parfaitement de ces poursuites engagées contre des manifestants qui protestaient pacifiquement contre les dangers d'une nouvelle guerre, contre le réarmement de l'Allemagne qui n'avait pas été dénazifiée ni démocratisée comme l'Armistice de 1945 le recommandait.

Des militants du Mouvement de la Paix, des Démocrates, des Pacifistes de toutes confessions furent matraqués sauvagement dans la rue. Au cours de cette vague de répressions brutale, les Seynois connurent des vexations inimaginables sous des gouvernements dits Républicains.

On alla même, un certain dimanche matin, jusqu'à interdire une manifestation silencieuse qui se proposait seulement de déposer une gerbe de fleurs au Monument aux morts. Des barrages de police s'y opposèrent. Alors la manifestation changea de direction. Il fut décidé de déposer les fleurs sur la tombe des soldats du Souvenir Français.

Mais la manifestation se heurta encore, devant la porte du cimetière, à un barrage de policiers. Comme les incidents risquaient de s'aggraver dangereusement, une délégation fut finalement autorisée à déposer les fleurs sur les tombes.

Comment qualifier des mesures aussi scandaleuses !

Parler de Paix ?

S'élever contre la renaissance du militarisme allemand, du fascisme, de l'hitlérisme ?

Quel crime abominable !

Des instituteurs parfaitement conscients que, sans une politique de Paix, la renaissance de l'école était impossible et qui le proclamèrent, furent poursuivis, arrêtés comme des malfaiteurs.

Des sièges d'organisations démocratiques furent perquisitionnés, pillés, leur matériel volé ou détruit.

On aurait cru revivre les années du fascisme triomphant. L'infamie n'avait plus de limites pour ces gouvernants qui prétendaient incarner la quintessence de la Démocratie.

À La Seyne comme ailleurs, les mesures de répression eurent pour conséquences une mobilisation plus intense des vrais démocrates, des partisans de la Paix, des défenseurs de l'Enseignement, de tous les gens de bon sens.

Aussi, lorsque le 16 mai 1951 exactement, Toussaint Merle appela les parents des élèves de l'École Martini à se réunir à la Mairie pour discuter du sort de l'école, ce fut à une belle manifestation de soutien aux propositions municipales que l'on assista.

Le Maire expliqua, preuves à l'appui, que des mesures urgentes devaient être prises sans quoi la rentrée suivante ne pourrait s'effectuer.

Une motion fut adoptée à l'unanimité, motion que le Conseil Municipal fit sienne et qui fut transformée en délibération.

Ce texte demandait aux autorités académiques et ministérielles :

1°) Que soient reconnues les classes préparatoires au baccalauréat, ainsi que la classe de Quatrième technique que la Ville faisait fonctionner à ses frais.
2°) Que soit créée une classe supplémentaire de Troisième technique.
3°) Que la classe de Première technique soit reconnue, car elle fonctionnait également grâce à des heures supplémentaires payées par la Ville.
4°) Que soient nommés :

Il s'en fallait donc de beaucoup pour que l'enseignement dispensé à La Seyne soit complet et que les jeunes Seynois soient préparés convenablement aux examens.

Il ne s'agissait là que de revendications parfaitement valables sur lesquelles toutes les familles d'élèves tombèrent rapidement d'accord. Après le vote de cette résolution, l'Administration et tous les parlementaires du département furent alertés.

Cette action devait porter ses fruits.

L'année suivante, des nominations supplémentaires furent accordées et les travaux d'agrandissement acceptés.

Cependant, il faut bien dire que tout ne fut pas résolu. Nous allions assister à une étape. Si, pendant près de trente ans, les effectifs de Martini n'avaient pas tellement évolué, à partir de la seconde guerre mondiale, toutes les données de ce problème difficile de l'éducation allaient être bouleversées.

 

1951 : Nouveaux coups contre l'École Publique

Si, depuis 1947, il y avait au Parlement une majorité apparemment laïque, les élections générales de 1951 allaient lui porter un coup de grâce.

Un nouveau système électoral appelé les apparentements fut imaginé dans le but, disait-on, d'assurer une majorité de gouvernement et, partant, une meilleure stabilité de la IVe République.

On peut résumer ainsi la loi sur les apparentements : les partis sont autorisés à conclure des alliances en vertu desquelles les voix obtenues par les listes apparentées seront comptabilisées en commun. Si le bloc des apparentés obtient la majorité absolue, tous les sièges lui reviennent.

La coalition étant dirigée surtout contre les Communistes, ceux-ci perdirent cent sièges aux élections et, avec ça, bien entendu, fut perdue la majorité laïque. Le grand vainqueur du scrutin de 1951, le M.R.P., exigea immédiatement le retour, comme sous le régime de Vichy, des subventions aux écoles libres...

Le bloc anti-laïque groupait alors une majorité de TROIS CENT VINGT voix.

C'est alors que le Président du Conseil René Pleven déposa un projet de loi sur les bourses et le député Barangé, une proposition de la loi prévoyant des allocations au bénéfice des maîtres de l'Enseignement privé.

Ces propositions votées, nous fûmes ramenés dans des conditions similaires à celles que le régime Vichyssois fit à l'enseignement.

L'école publique essuya une cuisante défaite. La grande idée de Jules Ferry et de la IIIe République, à savoir " qu'avec l'argent demandé à tous, on ne peut entretenir que les écoles ouvertes à tous " fut officiellement abolie.

Une contre-offensive s'organisa alors.

Le 30 septembre de cette année 1951, des milliers de laïques se réunirent à Saint-Dié autour de la statue de Jules Ferry pour affirmer leur volonté de rétablir l'école laïque dans tous ses droits. Le serment qu'ils prononcèrent se terminait ainsi :

" Ils s'engagent par serment à lutter de toute leur foi, de tout leur enthousiasme, sans trêve et sans défaillance, jusqu'au jour où seront intégralement rétablies, dans leur lettre et dans leur esprit, sur tout le territoire de la République, les grandes lois laïques, rempart de la Paix religieuse, des droits sacrés de l'enfance, des libertés républicaines et de l'unité française ".

On a pu donc voir, à la lecture de ce qui précède, l'acharnement dont faisaient preuve les forces laïques seynoises pour défendre l'enseignement public, avec l'appui total de la Municipalité Toussaint Merle.

Les actions développées dans ce sens prirent des formes très diverses.

 

Les enseignants relèvent le défi

Dans cette période très troublée, des fêtes scolaires s'organisent, des kermesses, des défilés sportifs, rassemblent des milliers et des milliers d'enfants et leurs familles.

En tête de ces défilés, des oriflammes multicolores flottent au vent. Des banderoles portent les mots d'ordre de l'actualité : " Vive l'école laïque ! École de la République ! " En tête du cortège marchent les membres du Comité directeur de la Caisse des Écoles et la Municipalité.

La Caisse des Écoles, forte de milliers d'adhérents, coordonne les programmes de réjouissances, réalisés grâce au dévouement des instituteurs, des institutrices, des moniteurs de sport et des professeurs d'éducation physique. Les mouvements d'ensemble exécutés sur le stade municipal par plus de mille enfants, les lâchers de pigeons, déchaînent l'enthousiasme sur les gradins. Les écoles de sport se manifestent. La vitalité du sport scolaire à La Seyne s'affirme avec force.

Dans les années 1950 - Fête scolaire
Plus de mille enfants exécutant des mouvements d'ensemble sur le stade municipal de la Canourgue

Les écoles maternelles, les écoles primaires organisent chaque année leur fête à l'issue de l'année scolaire, avec des expositions de travaux et des kermesses.

Les distributions de prix dans les établissements d'enseignement secondaire prennent une importance accrue d'année en année. Elles se déroulent en général dans une salle de spectacle en présence des parents d'élèves, du corps enseignant et des personnalités locales et départementales.

Les discours officiels mettent l'accent sur la nécessité de lutter pour la défense de l'École Publique.

Dans les années 1950-1951, les chefs d'établissement, M. Malsert et Mme Todeschini, décidèrent d'organiser une grande fête scolaire dans la salle de La Seynoise. Le programme de cette soirée comportait des chœurs, des déclamations, des scènes comiques, etc.

Entre autres saynètes, une classe du Collège Martini avait été chargée de jouer la fameuse Partie de cartes, ainsi que la Mort de Panisse, extraites de la Trilogie de Marcel Pagnol.

Là, je tiens à consacrer quelques lignes à un fait inattendu qui devait décider pour une large part du destin d'un élève dont les talents artistiques se révélèrent brillamment à tel point que, par la suite, ses succès rejaillirent sur notre École Martini et même sur notre Ville de La Seyne.

Je veux parler du jeune Henri Tisot que le metteur en scène, le regretté professeur de Lettres M. Turquay, si mes souvenirs sont exacts, avait campé dans le personnage de Panisse.

Henri avait imité le grand acteur Charpin à la perfection. Son succès fut énorme. Le public avait bien ri à toutes ses répliques et il avait apprécié son grand talent. À la sortie, on entendait des exclamations :

- Il est terrible, ce petit ! Il a vraiment la grande classe !
- Mais il faut le pousser ! Il fera certainement carrière dans le théâtre !

Et Henri Tisot baignait dans la joie. Comme on le comprend !

Il racontera dans son livre Le copain et le cabanon, qu'il écrivit une quinzaine d'années plus tard, les impressions qu'il ressentit au sortir de cette première représentation en public. On peut y lire, entre autres :

" Il n'y avait pas de doute, je devenais " quelqu'un "... Pour la première fois de ma vie, j'avais été pleinement heureux./.../

Une fois sorti de scène, tout fut changé pour moi. Il avait suffi de cette demi-heure scintillante pour que le ciel m'apparût léger et l'air enfin respirable.

Tout le monde, autour de moi, me considérait, je le sentis bien aux regards pleins d'envie de mes camarades, aux œillades des filles de l'école Curie dont les yeux s'étaient tout à coup remplis d'étoiles..."

Tout le monde connaît la brillante carrière d'Henri Tisot dont cette soirée fut peut-être le départ décisif.

Avant de laisser ce souvenir agréable, je veux encore rappeler une phrase relevée dans Le copain et le cabanon. Henri nous fait part d'une réflexion d'un de ses professeurs qui lui dit au moment de cette fête de fin d'année :

- Toi, tu verras ce que je te dis : tu passeras ta vie à faire le couillon sur les planches.

À vingt ou vingt-cinq ans d'intervalle, si le hasard voulait que Tisot rencontrât cet ancien professeur, il pourrait sans doute lui répliquer aimablement avec l'humour dont il a le secret :

- Le plus couillon des deux n'était sûrement pas celui que vous pensiez, Monsieur le Professeur.

 

De 1950 à 1954, l'École Martini au faîte de sa carrière

Nous avons montré longuement les difficultés énormes qu'il fallut surmonter après la Libération pour que notre jeunesse puisse recevoir un enseignement de qualité afin d'assurer son avenir.

Patiemment, avec le concours dévoué du corps enseignant, avec la politique compréhensive des Municipalités d'après la guerre, des structures pédagogiques nouvelles se mirent en place.

Elles ne concernaient pas spécialement l'école primaire à laquelle peu de changements matériels furent apportés. Pendant quelques années, celle-ci fut séparée, administrativement, du moins, des Collèges moderne et technique.

Elle comprenait alors treize classes, dont une de perfectionnement. Ses effectifs atteignirent dans cette période jusqu'à trois cent quatre-vingts élèves. Le personnel enseignant se renouvelait peu à peu par le jeu des mutations et des départs à la retraite.

Les écoliers de cette époque n'oublieront pas M. Boucaud, l'infatigable animateur des réjouissances scolaires qui nous chanta et dansa si souvent la Sardane de son pays catalan, le pionnier des colonies de vacances municipales qu'il impulsa de sa foi laïque pendant plus de vingt-cinq ans...

Ils n'oublieront pas non plus la voix grave de basse chantante de M. Stauffer qui couvrait tous les tumultes pendant les récréations et qui retentit pendant de longues années dans les centres de vacances de la Ville.

Ils reverront toujours les belles silhouettes d'André Deferrari, de Sajhau, de Spérandéo, maîtres d'élite, hélas disparus trop tôt.

Ils auront constaté aussi le renforcement considérable de l'élément féminin dans le personnel enseignant. Rappelons le nom de quelques institutrices qui ont enseigné à l'École Martini pendant plusieurs années, comme Mmes Mouche, Roumieux, Clerc, Paul, Silvy, Bonnet, Cazenave, Stéphan, Ravezié, Giloux,...

Année 1952-1953 - Cours moyen 2e année - Classe de M. Barthélemy BOTTÉRO
On trouvera ci-dessous la liste d'une grande partie des élèves de cette classe, telle qu'elle nous a été communiquée en avril 2006, de mémoire, par André Perni et complétée ensuite par Jean-Claude Adalid, Gérard Garier et Philippe Soleri.
De gauche à droite :
Debout sur le banc : Imperiale, Baudisson, Lagomarsino, ?, ?, Lucien Bassissi, Roland Peyrache, Oddone
Debout : Robert Arnaud, Monsieur Bottero, Alain Oliva, Albert Laïk, Troubat, Garnieri, Paillou, Philippe Soleri, Lucien Autran, Richelme, Edouard Cadière, D. Parrini
Assis : Albert Pratali, Jean-Mathieu Barontini, Raoul Blanc, ?, Chiantaretto, Cigliano, Nobili
Assis sur le sol : Jean-Claude Adalid, André Perni, Jean-Pierre Dallest, Mondou, Gérard Garier, Sicardi, Carbonel

Les collèges technique et moderne connurent des transformations beaucoup plus profondes.

Des sections classiques vinrent compléter l'enseignement du collège moderne. L'enseignement du Latin, agréé par l'Administration de l'Éducation nationale, fut donnée pour la première fois par M. Martin.

Après plusieurs années d'interventions, de protestations, les classes de préparation du baccalauréat furent admises.

De la sixième à la première moderne, l'éventail était complet et d'année en année, il fallut dédoubler des classes.

L'enseignement des langues vivantes nécessita des créations de postes supplémentaires (Anglais, Italien, etc.).

Au collège moderne, le nombre des divisions passa de six à douze.

La situation au collège technique était à peu près semblable. Le nombre des divisions passera à vingt-cinq en 1956 et trente en 1958.

Il va de soi que les problèmes de locaux devenaient dramatiques. On construisait en empiétant sur la cour, on rehaussait des classes, quand on le pouvait, on cloisonnait les salles les plus grandes afin de faciliter les rotations dans les horaires.

La vieille École Martini ne faisait pas peau neuve pour autant : elle était devenue un monstre.

Mais l'enseignement était tout de même dispensé par des professeurs excellents qui s'accommodaient tant bien que mal du mauvais tirage des poêles à mazout ou à charbon et des installations sanitaires archaïques.

Le chauffage central avait bien été installé à l'école Curie en 1950, mais la pauvre École Martini ne pouvait bénéficier de la même faveur.

Malgré les difficultés, un bon travail s'accomplissait tant au collège moderne qu'au collège technique.

À chaque rentrée scolaire, dans cette période, nous vîmes arriver des professeurs nouveaux, heureux de leur nomination dans une région au climat attachant, déçus, cependant des conditions de travail si difficiles.

Sous l'impulsion de professeurs compétents dont la réputation était faite depuis la guerre, comme MM. Dary, Laure, Turquay et Faber, les succès s'amplifiaient chaque année.

D'autres professeurs s'affirmaient comme MM. Pinson, Muraccioli, etc. qui laisseront des souvenirs durables dans la mémoire de nombreux Seynois.

Nos concitoyens ne pourront pas oublier non plus tous ceux et toutes celles qui ont exercé à Martini dans les dernières années avant le transfert dans l'établissement du quartier Beaussier et qu'il est impossible de tous citer. Mentionnons simplement, sans distinguer leurs spécialités : MM. Seiss, Boyer, Sérémy, Ysepi, Arnaud, Calais, Houlès, Guillaume, Liprandi ; Mmes Castinel, Toumsin, Philip, Mariotti ; MM. Marville, Gaudefroy-Demombynes, Mirgalet, Mme et M. Papazian ; MM. Maynau, Duloum, Acquaviva, Deck, Azam, Planavergne, Laporte, Vila,...

Du côté de l'enseignement technique, les choses avaient bien changé. Avec six divisions, l'organisation s'étalait sur un éventail allant des classes de Sixième à la classe de Première. On y préparait le Brevet d'Études Industrielles (B.E.I.). Là aussi, les succès étaient remarquables.

Les professeurs anciens, comme M. Boudon (Dessin, Mécanique), M. Varangue (Français), Ramognino (Mathématiques, Électricité) étaient bien près de la retraite. Mais la relève était assurée avec MM. Triquet, Imbert, Mariotti, Molinari, Mme Polge, Mlles Renard et Blanc-Lapierre, Mme et M. Beretti, MM. Borda, François, Barthélemy, Sabatier,...

Il avait bien fallu remplacer aussi M. Dumortier, Mme et M. Dubrocard, M. Burg, Mlle Dantony, MM. Marquion et Fecchino, dont le passage à Martini fut de courte durée.

L'enseignement du sport était dispensé de façon plus sérieuse que dans les années d'avant-guerre. Il fut organisé par des lois nouvelles.

Les anciens de ma génération se souviennent d'avoir vu les professeurs de Lettres, comme M. Romanet et M. Varangue, les professeurs de Sciences et de Mathématiques, comme M. Laure ou M. Doche enseigner la gymnastique et organiser des compétitions scolaires.

Dès la fin de la guerre, des maîtres d'éducation physique, des professeurs, furent formés et spécialisés pour cet enseignement d'une importance capitale, dont il fut enfin démontré qu'avec le développement physique du corps, les conditions de travail intellectuel s'améliorent considérablement.

Dans les dernières décennies, l'École Martini a pu bénéficier du concours précieux d'une lignée de professeurs sportifs doués et compétents. Citons MM. Durrieu, Troubat, Cagnon, Dutertre, Weingand, Guillou, Polge, Mlle Scaronne,...

Ils utilisèrent les installations sommaires d'avant-guerre, à savoir le sous-sol de l'école dans les jours de mauvais temps et le stade municipal à quelques minutes de marche.

Ici, nous pourrions montrer également que dans ce domaine, notre ville a connu des transformations profondes avec l'aménagement, sous l'impulsion de l'Adjoint délégué aux sports, Jean Passaglia, de nombreux terrains, plateaux d'évolution et gymnases, dans nos grands ensembles scolaires.

À Martini, les vieilles sections : ajustage, chaudronnerie, menuiserie, avaient évolué, Les structures remaniées donnaient trois sections :

- Section A - Fabrications mécaniques et machines-outils
- Section B - Constructions métalliques, chaudronnerie.
- Section C - Bois.

Chaque spécialité préparait à un Certificat d'Aptitude Professionnelle (C.A.P.) et les succès furent nombreux. Ce fut probablement dans cette période que les ateliers et les bureaux des Forges et Chantiers reçurent le plus d'anciens élèves de l'École Martini avec des qualifications très honorables.

Il convient d'associer à ces succès les maîtres d'atelier ou professeurs techniques-adjoints qui dispensèrent un enseignement de haute qualité, comme MM. Fabre, Lorenzini, Soléri, Chabaud, Veneziano, Richelme, Chailan, Gondran, Maury, Jaouen, Prulhière, Prablanc,...

Une collaboration fructueuse s'était établie entre les Chantiers Navals et l'École Martini. MM. Baude et Boudon donnaient régulièrement des cours aux apprentis des F.C.M. De son côté, l'entreprise facilitait l'accès des bureaux de dessin aux jeunes de Martini nantis de leur diplôme, c'est à dire du C.A.P. de dessinateur.

C'était déjà la réalisation du mot d'ordre actuel si bien justifié : Vivre et travailler au Pays.

En 1954, l'École Martini changea une autre fois d'appellation. Les effectifs du Collège moderne et du Collège technique atteignaient alors 536 élèves. Par rapport aux années d'après guerre, ils avaient été multipliés par 2,7.

L'école deviendra Lycée Classique, Moderne et Technique Martini. Remarquons au passage que le nom de M. Martini restera indéfectiblement attaché à l'établissement, quels que soient les changements intervenus dans la dénomination (école primaire-supérieure, collège moderne et technique, lycée classique, moderne et technique). Il en va de même pour l'école primaire qui a survécu à tous les bouleversements intervenus dans les structures pédagogiques.

Mais le titre ronflant de lycée ne fut pas suffisant pour permettre à l'établissement un renforcement de l'appareil de direction. Il faudra attendre encore trois ans avant que soit nommé le Surveillant général, M. Garceries.

En attendant, M. Roussin, secrétaire et le Directeur règlent tous les problèmes qui se posent. Et ils sont de plus en plus nombreux et de plus en plus complexes.

Est-il besoin de dire que leurs charges sont écrasantes ? On a peine à imaginer comment ils ont pu assurer le bon fonctionnement de l'établissement dans des conditions aussi difficiles.

 

Le départ de M. Malsert

En 1951, M. Malsert fit valoir ses droits à la retraite. Une retraite Ô combien méritée !

La cérémonie organisée à cet effet coïncida avec la distribution des prix qui se fit dans la salle du cinéma Rex aujourd'hui disparue.

Sa brillante carrière fut retracée succinctement, comme il le souhaitait, car il n'aimait pas les discours flatteurs.

L'ensemble du personnel de l'École Martini, sachant son goût très vif pour la littérature, lui offrit, entre autres présents, trente volumes d'une superbe reliure rassemblant toute l'œuvre d'Anatole France, auteur qu'il affectionnait particulièrement.

M. Malsert répondit dans un discours émouvant mais concis, sachant bien que devant un auditoire d'enfants et de jeunes gens surchauffés après la lecture du palmarès de fin d'année, le discours le meilleur est le plus court et le moins solennel. Ces propos pourraient se résumer en quelques mots : " Vous m'avez comblé de louanges et de gâteries, je vous en remercie infiniment, mais après tout, je n'ai fait que mon devoir ".

Le lendemain, en dépit de ses protestations, la fête se prolongea. Dans la vétuste cantine de l'antique École Martini, le personnel se réunit autour d'un apéritif, dans une ambiance joyeuse, parce que nous étions là pour souhaiter du bonheur à un homme qui allait goûter un repos bien gagné. Mais cette allégresse était tout de même teintée de mélancolie car on sentait que ce n'était pas seulement un collaborateur qui s'en allait, c'était aussi le guide précieux, le chef qui avait donné toute la mesure de ses talents d'organisateur, qui ne craignait pas de défendre ses subordonnés : devant les instances administratives, quand une injustice le menaçait. Un homme simple et modeste, un dirigeant qui avait su allier la fermeté nécessaire à la compréhension des difficultés de chacun. Il fut pour nous un tuteur qui s'occupait du devenir de ses élèves comme s'il s'était agi de ses propres enfants, conseillant les uns, encourageant les autres, trouvant souvent des filières leur permettant de se faire une place honorable dans la société.

Lui qui avait prononcé l'éloge de nombreux collaborateurs au moment de leur départ à la retraite, allait s'effacer à son tour.

Il redoutait quelque peu cette rupture brutale entre les activités aussi débordantes que furent les siennes et le repos intégral qu'il rechercherait tout de même à meubler. Quand on lui posait la question : " Qu'allez-vous faire, à présent ? " Il répondait en souriant : " Je me ferai peut-être éleveur de géraniums ".

Effectivement, il s'intéressait beaucoup à son jardin floral admirablement cultivé. Comme on pourra le lire dans sa biographie, il s'occupa à des activités suffisantes pour ne pas trouver le temps trop long.

Ainsi donc, M. Malsert quitta l'École Martini pour laquelle il avait tant travaillé. C'était la loi inexorable du temps qui passe, la relève éternelle des générations.

Il n'aura pas eu la joie d'inaugurer le nouvel établissement qu'il souhaitait depuis de longues années. Mieux que quiconque, il savait les besoins impérieux de l'école. Les structures pédagogiques nouvelles, il avait largement contribué à les créer ; il ne restait plus qu'à mettre en place les locaux adéquats.

Ils sortiront de terre six ans après son départ. Cependant, M. Malsert aura la joie, avec la Délégation Cantonale qu'il présida et avec l'Amicale Laïque qu'il impulsa, d'assister à La Seyne, au démarrage et à la réalisation partielle des grands ensembles scolaires dont l'étude fait l'objet de la deuxième partie de notre ouvrage.

 

Organisation de l'école Martini en 1958
ENSEIGNEMENT MODERNE
Classes : ................................................................... 18
Professeurs : ............................................................. 12
Maîtres auxiliaires : .................................................... 12
Élèves : ................................................................... 490
ENSEIGNEMENT TECHNIQUE
Classes : ................................................................... 12
Professeurs : ............................................................. 16
Élèves : ................................................................... 380
SECOND CYCLE (une classe par section)
Section de Sciences expérimentales : .......................... 18 élèves
Section de Mathématiques élémentaires : .................... 11 élèves
Section classique : 10 élèves
ENSEIGNEMENT DU PREMIER DEGRÉ
Classes : ................................................................... 17
Instituteurs : .............................................................. 13
Élèves : ................................................................... 444
Classe de Perfectionnement
Classe : ...................................................................... 1
Instituteur : ................................................................. 1
Élèves : .................................................................... 17
PERSONNEL DE DIRECTION
Directeur : .................................................................. 1
Surveillant général : ..................................................... 1
Répétiteur : ................................................................. 1
Secrétaire dactylo : ...................................................... 1
TOTAL DU PERSONNEL : .............................................. 46
TOTAL DES ÉLÈVES : ................................................ 1.370

 

 

LÉGENDE

Ce plan est celui des dernières années de l'école, peu avant sa destruction.

Les parties hachurées représentent les surfaces construites ultérieurement, à partir de l'ancien Hôtel de la Dîme.

1 - École primitive, construite sur l'Hôtel de la Dîme
2 - Classes de l'école primaire supérieure
3 - Ateliers
4 - Cour Nord
5 - Salles de classes - enseignement des retardés.
6 - Cour Sud
7 - Agrandissement de 1950
8 - Préau
9 - Préfabriqué
10 - Préfabriqué
11 - Bureau de la Direction
12 - Conciergerie
13 - Cantine
14 - Sanitaires


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