La Seyne_sur-Mer (Var)  La Seyne_sur-Mer (Var )
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du Tome I
Marius AUTRAN
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Images de la vie seynoise d'antan - Tome I (1987)
Janas, le Mai
(Texte intégral du chapitre)
 

 Lorsque vous suivrez la rue d'Alsace, en direction de l'église, et que vous bifurquerez à votre droite pour monter vers le quartier Cavaillon, vous porterez votre regard à quelques mètres au-dessus de votre tête, pour déchiffrer les panneaux indicateurs qui sont apposés au mur.

Le plus récent est une plaque de rue portant le nom de Jacques Laurent (1814-1885), fervent Républicain Seynois qui fut déporté pour avoir résisté au Coup d'État du 2 décembre 1851 à l'issue duquel le Prince-président Louis-Napoléon Bonaparte devint l'Empereur Napoléon III.

La seconde plaque, plus haute [dite « plaque de cocher »] et plus ancienne, donne là, en plein centre-ville, la direction de lieux qui sont certes familiers à la plupart des Seynois, mais qui se trouvent à l'autre extrémité de la commune. Il y est en effet inscrit : Chemin vicinal n° 2, dit de Notre-Dame, puis : Les Moulières, 4,500 km - Janas, 6,950 km.


Plaque rénovée par M. Michel Havard en 2013

Nous avons consacré de longs développements aux Moulières et au Massif de Sicié. Ce n'est pas un hasard si ces points de notre commune sont indiqués au cœur de la vieille ville, à côté de l'église paroissiale.

Nous avons donc vu toute l'importance des Moulières, nous allons voir que Janas a été un des hauts lieux de notre commune, par son riche passé. D'ailleurs, sur les cadastres les plus anciens, établis au moment où La Seyne venait de naître par séparation d'avec Six-Fours, sont mentionnés le chemin des Moulières et la Forêt de Janas.

Janas est un nom qui sonne familièrement, non seulement aux oreilles seynoises, mais à celles des habitants de toute l'aire toulonnaise. Les attraits si évidents de cette forêt sont attestés depuis des lustres.

 

Un lieu béni des dieux

Selon toute vraisemblance, les Romains édifièrent un temple dédié au dieu Janus et à Jana, déesse des chemins.

Ce dieu était le Janus Foresta, dieu suprême de la vieille Étrurie. Doué d'une sagacité extraordinaire, il pouvait tourner son regard aussi bien vers le passé que vers l'avenir, c'est pourquoi il est représenté par une tête à deux visages, et qu'il est vénéré comme un génie bienfaisant qui veillait sur la prospérité de la famille.

Pourquoi un sanctuaire à l'orée de cette forêt ? Et pourquoi à ce dieu-là ? Les habitants de la commune de Janas, dans les Cévennes, doivent se poser, pour leur terroir, les mêmes questions.

En fait, l'explication de la présence d'un temple en forêt, s'explique en partie par le nom de Janus Foresta. Ce vocable est dérivé du bas-latin foris, qui a donné forestare signifiant bannir, mettre dehors. En dialecte provençal, on connaît le mot fouaro qui signifie dehors et dérive de cette origine. C'est aussi la source étymologique du mot forain.

Il est probable que Janus Foresta ait veillé sur la forêt car son temple était mis hors de la cité. Un temple, d'ailleurs, qui était fermé en temps de paix et ouvert en temps de guerre.

Il faut dire aussi que lorsque Jules César conquit la Gaule, en 59-51 avant Jésus-Christ, il attacha une attention très particulière aux forêts d'où il tirait la matière première nécessaire à son industrie militaire. En outre, la religion païenne peuplait la nature de divinités aux fonctions très variées qui valaient à chaque source, à chaque bosquet, d'être un peu considéré comme un temple. Les héritiers que nous sommes de la culture monothéiste catholique auraient peine à imaginer la mentalité des Romains en matière de religion, s'il n'en avaient gardé la trace avec la multiplication des saints patrons, véritables intercesseurs entre Dieu et les hommes. Quand un croyant (ou une croyante) arpente chapelles et oratoires pour demander une grâce à tel ou tel saint, il ne se comporte pas autrement que le citoyen de Rome qui faisait une offrande à Junon, à Janus ou à la nymphe des bois.

Le culte païen est si profondément ancré dans nos mentalités que l'Église, lorsqu'elle succéda comme seule institution stable à l'Empire Romain battu en brèche par les Grandes Invasions, tenta de substituer des rites religieux aux anciennes pratiques. C'est ainsi que bien des pèlerins qui vont au Mai, animés par la plus pure foi chrétienne mettent aujourd'hui leurs pas dans les traces de lointains habitants de ce massif qui allaient accomplir un sacrifice ou un rite d'action de grâce.

Certains historiens expliquent ainsi la présence du sanctuaire de Notre-Dame du Mai. Il aurait eu pour vocation de couvrir de la protection mariale cette forêt dans laquelle furent pratiqués des cultes païens.

Il est en effet vraisemblable que dans ce vallon de Janas, ouvert sur la plaine, au cœur d'une forêt dense, traversé par un ruisseau au cours ininterrompu, fut érigé un petit temple païen.

D'ailleurs, au début du Moyen Âge, l'Église fit une recommandation dont on trouve le texte dans « Gallia Christiana Novissima »...« nous ordonnons et établissons un huitième clerc qui sera prébende sur le territoire de la dite cité de Toulon, dans la partie de la fontaine des idoles de païens, où était un temple de faux dieux sous le nom de Janus Foresta au pied de la dite montagne /.../ que dans ce vallon soit faite une église pour un autre saint et nous donnons en prébende le centième de florin et dans les prébendes vingt cinq florins dans notre Église de Toulon ».

Ces précisions attestent bien du lien entre le nom de Janas et le dieu romain Janus.

Cette forêt est certainement très ancienne, puisqu'elle couvre le massif primaire de Sicié. La nature du sol a donné naissance à une végétation très variée.

 

La végétation

Malgré les changements climatiques qui ont affecté notre région, au fil des ères géologiques, malgré les vicissitudes plus contemporaines causées notamment par de grands incendies, la végétation de Sicié est très intéressante par la grande diversité des espèces qui la composent.

Que le lecteur veuille bien nous suivre pour quelques lignes, dans une petite promenade botanique, certes sommaire, mais qui ne manquera pas de l'éclairer sur ce qui est notre richesse naturelle.

La végétation originelle du massif serait dominée par le chêne vert (éouve) auquel se mêlent le chêne-liège (suvé) et les pins (pin d'Alep, pin maritime et pin parasol). La dégradation de cette végétation arborée, causée par des phénomènes naturels ou provoqués, a donné naissance à du maquis, des cistaies, des garrigues ou des pelouses.

Aux arbres se mêlent de nombreux arbustes comme la bruyère arborescente, le calycotome épineux (argeiras), le laurier-tin, le pistachier lentisque. On trouve aussi des lianes comme la salsepareille (aglariat) aux magnifiques fruits rouges, le chèvrefeuille à l'odeur suave, l'asperge, la ronce, la clématite...

Nous passerons sur le nombre impressionnant de plantes herbacées : labiées comme la sauge, graminées comme le dactyle, ombellifères comme le fenouil.

Dans le premier stade de dégradation de la chênaie, on rencontre des plantes de maquis : l'arbousier, la bruyère à balai, le genévrier cade ; puis des plantes de la garrigue : le chêne Kermès (riganèou), le genêt d'Espagne, le romarin, le thym ; puis encore des plantes de cistaies avec l'arum, toutes les variétés de cistes (ciste de Montpellier ou messugo nègro, ciste blanc, ciste à feuilles de sauge, etc.), et enfin des plantes de la pelouse : l'immortelle, l'aster, l'inule visqueuse (nasco), l'alysson, le calament, la valériane, etc.

Pour terminer cette brève énumération, ajoutons que certains vallons frais, à Janas et sur le versant de Six-Fours, favorisent l'apparition de frênes (fraï), de peupliers blancs (aubo), de sorbiers, d'églantiers et d'aubépines.

Cette liste, qui pourra paraître longue et fastidieuse au lecteur non-botaniste, montre un aperçu de la richesse extraordinaire de la végétation sur ce massif.

Le système hydrographique de la presqu'île - nous en avons parlé à propos des Moulières - ne fut pas toujours celui que nous connaissons aujourd'hui. Les phyllades et les quartzites aux failles généreuses, canalisaient en abondance l'eau pure de sources intarissables. Cela permettait l'épanouissement d'une flore luxuriante et donc, probablement, l'installation de peuplements humains.

Cette présence humaine semble en effet logique, sous un ciel clément, sur des rivages marins aux eaux prolifiques en toutes espèces comestibles, en lisière d'une forêt giboyeuse et regorgeant de ressources nourricières et de matières premières pour construire son abri, fabriquer des ustensiles, etc.

Jusqu'à la conquête romaine, l'homme n'a pas laissé de traces tangibles de son passage sous les frondaisons de Janas. A cette époque, la forêt couvrait la quasi-totalité du terroir de Sicié dont le peuplement se concentrait sur la colline du Vieux Six-Fours, avec sans doute quelques habitations autour de l'anse du Brusc. Sur les collines qui se succèdent de Mar-Vivo à Bastian, de Tamaris à Chateaubanne, on voit subsister des restes de ces grands bois où prédominent les pins et les chênes.

La période calme de la Paix Romaine incita les habitants de la presqu'île à cultiver les meilleures terres de la plaine. Alors commencèrent les grands défrichements qui furent les premières agressions humaines contre la forêt.

 

L'agression contre la forêt

C'est dans les terres alluviales où se trouvent aujourd'hui les quartiers des Plaines, de Saint Jean, de Tamaris, que nos agriculteurs commencèrent à planter. Sans doute aussi s'intéressèrent-ils aux coteaux les mieux exposés. Alors, ils entreprirent de faire reculer la forêt.

Ils s'employèrent à défoncer la terre, à l'ensemencer, à construire des restanques pour retenir la terre arable, à planter des fruitiers, des vignes, des oliviers, des céréales... Ils pratiquèrent aussi l'élevage qui constitua une autre agression contre nos bois et nos futaies.

Alors les ruminants, les caprins, les ovins, causèrent de véritables ravages. Dans le même temps, les hommes commencèrent l'exploitation forestière qui leur procurait la matière première pour la construction des navires, des charrettes, des tonneaux.

Parallèlement, en bordure de la rade marécageuse, La Sagno se développait. Elle le fit si bien que, dépassant sa commune mère, elle obtint un jour sa «majorité» en devenant autonome.

Alors, un jour de l'an 1657, les bois de Janas virent arriver une cohorte d'arpenteurs qui, les parcourant en tous sens, établirent les limites entre Six-Fours et La Seyne.

La séparation des deux communes suivra un tracé presque rectiligne, depuis le Camp Laurent jusqu'au sommet du massif. À l'est de la ligne de partage des eaux, sur les collines de Sicié, commencent les terres seynoises, à l'ouest, les terres six-fournaises.

Bon nombre de nos concitoyens ignorent que la chapelle de Notre-Dame de Bonne Garde se trouve en territoire de Six-Fours, alors que les vestiges de la tour de guet qui lui font face, sont en territoire seynois. Un terme, fixé contre l'escalier d'accès, témoigne du passage de la frontière entre les deux communes.

Trois grandes dates ont marqué l'histoire de Sicié au XVIIe siècle :

1625, avec la construction du sanctuaire de Notre-Dame de Bonne Garde. Dès lors, ce promontoire jusqu'ici fréquenté surtout par les veilleurs qui signalaient l'arrivée de navires ennemis, reçut régulièrement la visite de pèlerins.

1657, date de naissance de la commune de La Seyne séparée de celle de Six-Fours. Il s'ensuivit des litiges quant à l'exploitation des bois, à l'usage de la chapelle et à l'utilisation des moulins et des lavoirs des Moulières.

1669, enfin, où fut promulguée par Colbert sa fameuse « ordonnance sur le fait des Eaux et Forêts » dans le but d'utiliser la matière première fournie par le bois pour développer une grande industrie de construction navale.(

S'il est vrai que Colbert dota la France d'une puissante flotte destinée à la guerre et au commerce, nos forêts en payèrent un lourd tribut.

Au début du XVIIIe siècle, il fallut réparer les dégâts. En 1706, par un arrêt du Parlement d'Aix, les défrichements furent limités, les verreries et les charbonnières interdites.

Mais l'exploitation abusive se poursuivra pendant plus d'un siècle.

N'oublions pas qu'en plus du pillage effectué par les hommes de ses beaux fleurons, s'ajouta pour la forêt des conditions climatiques parfois très dures. Notre région connut par exemple de longues périodes de sécheresse, auxquelles nos espèces méditerranéennes s'adaptèrent tant bien que mal.

Ce à quoi nos végétaux ne s'étaient pas préparés, fut, de janvier à mars 1709, une vague de froid exceptionnelle qui détruisit la quasi-totalité des vergers et des oliveraies de Provence. Même les chênes verts et les chênes lièges ne purent résister à cette agression imprévisible qui porta un coup très rude à Janas.

Par endroits, la Méditerranée se figea dans la glace, le vin gela dans les tonneaux en Haute Provence, les récoltes de blé furent anéanties.

Bien entendu, les populations atterrées, impuissantes à prévoir ces dérèglements du temps et à s'en prémunir, ne surent que réagir par l'organisation de nombreux pèlerinages invoquant la clémence et le pardon de la Vierge et des Saints.

 

Les pèlerinages

Depuis la création du sanctuaire de Notre-Dame de Bonne Garde, chaque jour, des fidèles se retrouvaient à Janas et prenaient courageusement le chemin de l'éminence sacrée. Ils allaient pieusement implorer la Bonne Mère, assaillis qu'ils étaient par les soucis et les dangers permanents.

Les épidémies de peste, de choléra, de variole, les disettes, les violences, les pillages, causaient dans la population de terribles ravages.

Alors, on voyait de longues files de pénitents vêtus de leur lourde robe de bure blanche ou grise, s'étirer sur les rudes sentiers en chantant des cantiques repris de loin en loin par de nombreux fidèles. Le clergé regroupé derrière les crucifix que portaient les clergeons (enfants de chœur), égrenaient leurs chapelets noirs et les psalmodies lugubres et lancinantes se perdaient dans les hautes frondaisons « Ave Maria, gratia plena... ».

Sur le chemin de N.-D. du Mai
La procession

Tous espéraient que leurs vœux seraient exaucés et que le fléau s'éloignerait.

Pendant près de trois siècles, Janas fut témoin de ces puissantes manifestations de foi chrétienne.

CANTIQUE POPULAIRE

À NOTRE-DAME DE BONNE-GARDE

Refrain :
O Notre-Dame ! protégez-nous
De Bonne-Garde, veillez toujours sur nous ;
O Notre-Dame ! protégez-nous,
De Bonne Garde, veillez toujours sur nous.
1
Seize cent-vingt, et voici l'an de grâce,
Où de l'éclair, protégeant les guetteurs,
Votre pitié, quand le danger menace
Vient les calmer et ranimer leurs cœurs.
2
Tel un essaim, tout le pays s'agite,
Des pénitents, pieds-nus suivent la croix,
On prie, on chante et la forêt palpite,
L'écho redit ce grand concert des voix.
3
Du sol surgit, comme un témoin de gloire
Ce Sanctuaire, à nos aïeux si doux,
Il est debout proclamant la mémoire
De trois cents ans, pleins de grâces pour nous.
4
Reine du Mai, Gardienne tutélaire,
Sur ce sommet, témoin de vos faveurs,
Six-Fours, Toulon et La Seyne en prières
En Mai surtout, célèbrent vos grandeurs.
5
Brillante Étoile ! Écartez du naufrage
Le voyageur exposé sur les flots,
Conduisez-le sain et sauf au rivage,
Restez toujours, l'espoir des matelots.
6
Quoique pêcheurs, bénissez-nous encore
Votre bon cœur n'est pas fermé pour nous,
A votre Autel, la foule vous implore,
O Vierge pure, elle a recours à Vous.
7
Mère de Dieu, montrez-vous notre mère,
Consolez-nous, guérissez nos langueurs,
À votre Fils, offrez notre prière,
Quand nous pleurons, offrez-lui nos douleurs.
8
Reine du Ciel, O Vierge toute pure,
Défendez-nous du démon tentateur,
Rendez nos cœurs sans tâche et sans souillure,
Conduisez-nous vers l'éternel bonheur.
9
O Notre Dame, un jour dans l'allégresse
D'un chant d'amour qui ne finira plus,
Appelez-nous à chanter Dieu sans cesse
Au Paradis au séjour des Élus.

Les souvenirs de notre enfance nous permettent de parler avec précision des derniers grands pèlerinages du début de notre siècle.

Ils étaient suivis avec des motivations nouvelles : on priait avec ferveur pour toutes les victimes des catastrophes maritimes notamment, qui furent si fréquentes en cette période de notre histoire. Alors que la science des hommes commençait à maîtriser les terribles fléaux des épidémies, elle restait impuissante devant les guerres et leurs sinistres conséquences. Pourtant, on implorait la Vierge pour que la France soit sauvée - tant pis pour les chrétiens d'outre-Rhin ! - On implorait aussi le ciel pour que cessent les conflits qui avaient embrasé le monde entier.

L'itinéraire du pèlerinage Seynois partait de l'orée du bois de Janas, en laissant à droite la pépinière entretenue par le garde forestier. On longeait le ruisseau qu'alimentait la fontaine, en suivant un sentier, jalonné de peupliers au tronc blanc, barré fréquemment par de grosses racines saillantes de pin, et qui s'élevait progressivement au-dessus du vallon, qui serpentait et qui grimpait vers une clairière appelée l 'Aire des Mascs (de masco qui signifie sorcière en Provençal).

La fontaine de Janas

Parmi les romarins aux labelles bleus, parmi les hautes bruyères aux clochettes blanches et les lentisques portant des grappes de fruits rouges, c'était un enchantement pour les yeux et pour les narines chatouillées par des senteurs infiniment variées. On gonflait ses poumons d'un air puissamment parfumé dont on ne pouvait se rassasier.

Cette Aire des Mascs était une étape. On y reprenait son souffle, car le plus difficile restait à faire : affronter le raidillon appelé Bagne Camiso (ou Bagno Camié) sur lequel, comme le dit son nom, on mouillait la chemise. [Rectificatif : il semble bien que le terme de Bagne Camiso s'appliquait en réalité au dernier tronçon, le plus raide, du sentier reliant la Forêt de Janas à l'Aire des Mascs (JCA)].

Malgré les efforts soutenus, les conversations allaient bon train. Parfois, une grand-mère exténuée se plaignait sur un ton marqué de désespoir :

- Oh Bou Diou ! Je me crois bien que c'est la dernière fois de ma vie que j'y monte à la Bonne Mère !
- Ah vaï ! Si le Bon Dieu le veut, nous nous y retrouverons encore l'an que vèn.
- Ate, le Docteur Loro, il m'a dit qu'avecque mon pauvre cœur, c'était pas bien prudent...
- Il déparle, le Docteur Loro ! Surtout depuis qu'il s'est pris la veste aux élections.
- Dieu garde ! Ne dites pas du mal du Docteur Loro, que c'est un brave homme. La semaine dernière, qu'il a été chez Pignatel - leur fille, elle a le mauvais mal, vous savez ?
- Eh bè ils avaient pas de quoi payer. En partant, lui, il y a laissé une pièce de cinq francs en argent sur la commode, aux Pignatel. Vous vous rendez compte cette générosité ? Un bien brave homme, vaï !
- Ah ça, c'est pas comme le mien ! Qué rapia ! Celui-là quand il est venu l'hiver dernier, que mon mari, il avait sa bronchite, il me dit : « Et vous, vous n'avez rien ? Faites-moi un peu voir cette gorge ». Avec le manche de la cuillère, que tout à l'heure il me fait vomir, il m'a regardée. J'avais rien du tout, tu parles ! Mais en partant, lui, il voulait pas se faire payer deux visites ? Què culot ! J'ai jamais vu une chose pareille...
- Et vous avez payé ?
- Plutôt deux fois qu'une ! Vous rigolez ou quoi ? J'y ai dit « Je vous ai rien demandé, moi ". Il a souri, comme s'il avait voulu galéjer. Mais tè ! j'aurais payé, il aurait pas dit non !

À la première étape, les enfants criaient famine. Il fallait déjà entamer les provisions de la journée. Ils réclamaient aussi de l'eau avec insistance ; heureusement, on avait fait le plein des bouteilles et des bidons au lavoir des Moulières, en venant, ou à la Fontaine de Janas, avant de commencer à monter dans la colline.

L'Aire des Mascs avait aussi cette particularité que s'y retrouvaient les pèlerins de Six-Fours avec ceux de La Seyne. Les Six-Fournais montaient soit par le chemin des Barelles, pour ceux qui venaient de Reynier, soit par le Vallon de Roumagnan, pour les Bruscains.

On assistait alors à des retrouvailles de familles dont les intérêts s'étaient parfois opposés au moment de la séparation des communes. Des Audibert et des Curet devenus charpentiers de marine à La Seyne, tombaient dans les bras d'autres Audibert, d'autres Curet, restés cultivateurs sur leurs terres de Six-Fours. La ville industrielle naissante, retrouvait avec bonheur ses racines agricoles et les paysans admiraient sans le dire, leurs cousins plus urbains. On était alors loin de penser que dans la crise qui stériliserait et la terre et l'usine, le recours serait un jour... le tourisme.

Les désordres survenus au moment de la séparation s'estompaient au fil des ans. Et puis, devant le danger mortel des épidémies qu'il fallait affronter, toutes invocations à la Vierge confondues, les fidèles des deux communautés reprenaient côte à côte le chemin incommode du sanctuaire, animés par la même foi salvatrice.

Certains s'imposaient des mortifications en marchant pieds nus sur les cailloux acérés en s'aidant d'un bâton, leurs souliers à la main. On en voyait même franchir des portions de chemin - certes bien limitées - sur les genoux.

Des garnements riaient sous cape, échangeaient discrètement des quolibets, mais généralement, la foule des croyants admirait et encourageait ces ascètes dans la poursuite de leurs exercices de piété.

 

Les oratoires

Le long du sentier autrefois le plus fréquenté pour se rendre au sanctuaire, et qui suit l'actuelle route du Mai par les Barelles, on trouve, de loin en loin, une petite construction prismatique, parallélépipédique, semblable à une stèle. Ces édifices d'environ deux mètres cinquante de haut, sont bâtis avec les matériaux trouvés sur place lauvisses, quartzites, grès, etc.

À la partie supérieure sous la toiture à deux pentes, une niche est aménagée qui abritait une statuette protégée par une petite porte métallique au grillage fin. On pensait déjà aux mécréants et aux vandales.

Oratoire des Anges Gardiens

Oratoire Saint-Louis

Oratoire Saint-Michel

Des constructions de ce genre existaient déjà à l'époque romaine et portaient le nom de fanum. Elles étaient consacrées au culte de quelque divinité païenne.

Avec les années, les oratoires qui n'ont pas souvent bénéficié de travaux d'entretien sont abandonnés à la rigueur des intempéries et aux mains sacrilèges. Ils sont aujourd'hui très dégradés.

Quelques vestiges, toujours en place sur la route du Mai, permettent au promeneur d'imaginer les scènes de pieuses dévotion dont le chemin des oratoires fut le témoin : tel groupe de jeunes filles apportant en offrande un bouquet de fleurs sauvages, ou telle grand-mère perdue dans ses prières, s'agenouillant sur la dalle taillée dans le roc, aux pieds du saint qui, du haut de sa stèle, semble toiser la foule de pèlerins.

Sur le parcours, aux endroits propices à un repos momentané, des marchands ambulants étalaient des images saintes, des crucifix, des amulettes, dont ils vantaient le pouvoir bienfaiteur, et des cierges de tailles variables. Il était admis que les chances de voir son vœu satisfait étaient proportionnelles à la taille du cierge posé devant la Vierge et donc du montant de la dépense.

Marchants ambulants

Se mêlaient aussi au pèlerinage : des mendiants, des loqueteux, qui tiraient un bon parti des dispositions pieuses de la foule qui se montrait un peu plus généreuse que d'ordinaire.

Pendant plus de trois siècles, la forêt de Janas vit défiler des générations de pèlerins, par les sentiers étroits, rocailleux. Les processions s'organisaient particulièrement au mois de mai. Si, d'abord, ce furent de véritables pèlerinages, qui ne se passaient certes pas sans fêtes et sans marchands forains, peu à peu ces derniers prirent le pas sur les manifestations de piété et de repentir. Encore que, nous allons le voir, il n'est pas impensable que les pèlerinages aient été plaqués sur une tradition de fête païenne qui resurgit à l'improviste.

 

Les fêtes foraines

Profitant de l'afflux des populations venues de Six-Fours, de La Seyne, de Saint-Mandrier, parfois même de Toulon et d'Ollioules, les petits marchands vinrent s'installer dans la vaste clairière avec leurs baraques foraines : loteries à la roulette, stands d'objets divers où l'on trouvait confettis, chapeaux en papiers multicolores, langues de vipère (ou de belle-mère), crécelles, sifflets, etc. Les balançoires, les stands de tir, les jeux de massacre, faisaient recette. Les enfants se rassemblaient devant le fabricant de berlingots qui pétrissait une pâte onctueuse, rose veinée de blanc, qu'il étirait comme un écheveau de laine jusqu'au point de refroidissement optimum. Alors, avec de puissants ciseaux, il débitait les Carpentras dont la bonne odeur de menthe chatouillait les narines gourmandes.

D'autres enfants quémandaient, geignards : « Maman... ! Maman... ! Achète-moi des pralines... ".

Plus loin, un marchand offrait des bonbons qu'il prenait dans une bassine de fer blanc luisant d'où se dégageait une forte odeur d'amandes grillées et de sucre chaud. D'autres arômes s'y mêlaient, comme ceux du pain d'épices, des chichis frégis, beignets grésillant dans l'huile, des meringues légères, ou des nougats mielleux.Le moment fort de l'animation qui régnait dans la clairière était atteint l'après-midi.

Une vaste rumeur roulait sous les frondaisons et se perdait dans la futaie, déchirée par les détonations de pétards et ponctuée par les claquements secs des carabines. Il y avait beaucoup d'amateurs au stand de tir, au fond du quel se balançaient des grappes de pipes blanches, devant des plaques métalliques noires où les balles s'écrasaient.

Aux appels des marchands se mêlaient les voix criardes, aiguës, glapissantes, même, des enfants courant en tous sens, envahissant le petit manège tiré par un cheval cagneux, tournant aux rengaines d'une viole, appareil de musique d'où sortait, par une fente métallique, une bande de carton perforé qui se pliait en accordéon à même le sol.

Les chevaux de bois noirs ou blancs qui se suivaient dans leur ronde sans fin, semblaient se cabrer sous la poussée d'une barre de fer qui sortait de leur abdomen. Ils montaient et descendaient en cadence, alternativement, dans le tintamarre d'une valse endiablée.

Au nord de la clairière, au cœur d'un bouquet de verdure, se dissimulait un marabout de couleur verte. Devant l'entrée étroite se pressaient de nombreuses jeunes filles et aussi des mamans. Elles y entraient une à une, à quelques minutes d'intervalle.

Une pythonisse basanée, un châle aux vives couleurs tombant sur ses épaules, les recevait pour leur dire la bonne aventure. Elle prédisait l'avenir en lisant les lignes de la main, en tirant les cartes, en décryptant la boule de voyance ou en interprétant les cartes astrologiques. Le tarif des prédictions dépendait du procédé employé.

Si l'on ne regardait pas à la dépense, la devineresse faisait le grand jeu qui vous permettait d'en savoir plus sur votre avenir.

En sortant de la tente où, pendant quelques minutes on avait écouté attentivement les prophéties parfois troublantes dans la clarté blafarde et vacillante d'un lumignon, on retrouvait la lumière du jour avec soulagement.

Des jeunes filles exubérantes faisaient alors étalage des heureux présages de la magicienne. D'autres, plus discrètes, souriaient simplement et ne se livraient à aucune confidence sur leur vie intime.

Forêt de Janas pendant le mois de Mai

Le Mai - la fête foraine

Le Mai - animation dans la clairière

Le Mai - le pique-nique (au fond, l'omnibus)

Pourquoi le Mai ?

La clairière de Janas se prêtait donc admirablement aux attractions foraines les plus diverses.

Mais pourquoi, depuis le Moyen Age, cette clairière avait-elle pris le nom de Champ de Mai ?

Cette expression était autrefois utilisée pour désigner les grandes assemblées de hauts personnages du Royaume. Il ne semble pas qu'elle puisse s'appliquer à Janas.

L'usage s'était établi, dans la population, de dire : « Nous allons au Mai ", identifiant ainsi le lieu des cérémonies avec les fêtes qui se passaient en ce mois printanier.

Si l'on se réfère à l'Antiquité grecque et romaine, on comprend mieux ces pratiques. En effet, le mois de mai y était fêté avec ferveur. Un vieux culte païen rendait hommage à Maïa, la mère de Mercure, déesse des Enfers et de l'abondance. Elle veillait sur la bonne germination des semences, au printemps, et témoignait du retour à l'éveil de la nature et de la vie.

Les Phocéens, qui fondèrent Marseille, et les Romains, organisaient chaque année des cérémonies et des fêtes qui duraient plusieurs jours. Ces fêtes prirent même, par les excès qui y furent commis, une tournure scandaleuse et l'Empereur chrétien Constantin les fit cesser.

Ce mois de mai est en permanence symbole du renouveau. La poésie des trouvères et des troubadours, au Moyen Age, puise dans ce thème l'inspiration de nombreux poèmes d'amour.

Cela s'explique bien quand on se replace dans la situation que connaissaient nos ancêtres. L'hiver, pour eux, était une rude saison, quand les logis étaient mal chauffés, les gens mal vêtus, mal nourris, quand la nourriture se faisait rare, que le saloir se vidait et qu'on en avait assez de manger des légumes secs. Le printemps annonçait les prochaines récoltes, la fin des mauvais jours, les heures chaudes où le corps ressentirait à nouveau le bien être du grand air.

Au XVIIIe siècle, l'Église catholique fit du mois de Maïa, où s'affirme l'éveil des sens, le mois de Marie, celui de la virginité et de l'abstinence. La tradition est d'ailleurs toujours établie de nos jours, selon laquelle on ne se marie pas au mois de mai. Un proverbe dit même « Au mes de maï, si marridon que leis aï " (au mois de mai, seuls les ânes se marient).

Malgré les efforts de l'Église pour effacer les anciens usages païens, ou les récupérer à son bénéfice, certaines traditions ont été pérennisées. C'est le cas de la Belle de Mai.

Il y a quelques décennies, on pouvait encore voir pendant le mois de mai, au coin des rues les plus passantes, ou sur les chemins les plus fréquentés, des fillettes couvertes d'un voile blanc, couronnées de fleurs, assises sur un tabouret dans une immobilité absolue. Autour d'elles, une ou plusieurs compagnes faisaient la quête. C'étaient les Belles de Mai.

Bien entendu, on promettait aux généreux donateurs, de voir tous leurs vœux se réaliser dans l'année.

Une autre tradition descend également de l'antique culte à Maïa, c'est celle de l'Arbre de Mai. Cette coutume, que l'on trouve encore à l'époque des rois Carolingiens, consiste à planter un arbre le premier jour du mois de mai, considéré comme le plus beau de l'année. Ainsi, les autorités romaines, soucieuses de l'entretien et de la prospérité des forêts, procédaient chaque année à des cérémonies rituelles et à des plantations d'arbres. Cela nous permet de penser que le 1er mai était déjà jour férié, avant même qu'il ne soit décrété Fête du Travail.

Pour en revenir à notre forêt de Janas, quand avec la chute de l'Empire Romain, le culte de Janus Foresta tomba en désuétude, quand l'Église catholique établit, de proche en proche, son influence sur toutes les provinces de l'ancienne Gaule, de nouvelles pratiques religieuses furent établies pour détrôner les dieux païens.

Ce n'est pas un hasard si la chapelle de Notre-Dame de Bonne Garde, appelée aussi Notre-Dame du Mai, fut inaugurée le 3 mai 1625. Cela se plaçait dans la perspective, dont nous avons évoqué les grandes lignes, qui consistait à placer les forêts sacrées des cultes païens, les périodes vouées à des fêtes anciennes, sous le vocable de la Vierge Marie.

Mais au fil des ans, la fête du Mai se modifiait insensiblement. Aux pèlerins animés d'une foi profonde se mêlaient peu à peu des promeneurs qui allaient surtout jouir de la beauté des paysages.

D'autres participants, amateurs de pétanque et de Pernod, laissaient leur femme et leurs enfants escalader jusqu'au sanctuaire pour y faire leurs dévotions. Eux préféraient attendre l'heure du pique-nique en s'adonnant aux joies de la pétanque, sous les pins parasols à l'ombre accueillante. Mais l'estrambord du jeu aidant, on procédait à moult libations qui faisaient considérablement baisser le niveau des bouteilles.

Le mois de mai était un moment de l'année impatiemment attendu par toutes les familles du massif de Sicié, auxquelles se joignaient des habitants des communes voisines. Que de joies simples rassemblaient les ouvriers des usines, des ateliers, et des champs, au cours de ces jours de détente et de repos hebdomadaire que, d'ailleurs ils avaient conquis de haute lutte !

Peut-être se rappelait-on à cette occasion, les rassemblements clandestins que les travailleurs des Forges et Chantiers de la Méditerranée organisaient en pleine forêt de Janas, alors que dans les années 1880, les syndicats n'étaient pas encore autorisés. Il fallait poster des vigies qui surveillaient l'arrivée éventuelle des gendarmes et donnaient l'alerte au moindre danger, car on se préoccupait d'abord de sauver le drapeau rouge.

Et puis on se régalait en fantastiques ripailles de charcuteries faites à la maison - en ces temps-là, toutes les bastides avaient leur porcherie - d'omelettes d'échalote préparées la veille par la grand-mère, de ces pommes de terre nouvelles à l'huile d'olive, agrémentées de filets d'anchois, quand ce n'était pas de la morue frite - de la vraie morue ! - dont on se léchait les doigts. Le tout était arrosé d'un de ces vins clairets de nos coteaux, fait dans la cave fraîche de la maison, par le père ou le grand-père habile vigneron.

Pendant que les anciens, un peu pompettes, dodelinaient de la tête en somnolant à l'ombre des pins, bras croisés derrière la nuque, canotier rabattu sur les yeux ou mouchoir posé sur le visage, les jeunes s'amusaient, se déguisaient, chantaient et dansaient. Quelques jeunes gens un peu hardis entraînaient des jeunes filles vers les buissons d'où sortaient ensuite des petits rires étouffés, à l'écart de la vigilance maternelle.

Jusqu'à l'heure vespérale, les flonflons du bal populaire se répandaient dans la forêt, au rythme des mazurkas, des polkas, des scottishs et, bien sûr, de la valse dont s'enivraient les couples.

Le soir tombait bien vite, et il fallait rassembler grands et petits. Puis les faoucado reprenaient le chemin de la maison.

À Janas, on se séparait après avoir dansé une farandole endiablée, sous les guirlandes emmêlées de serpentins et de petits drapeaux tricolores. Alors, sur les grands arbres, le calme de la nuit retombait peu à peu.

La multitude confuse refaisait donc en sens inverse le trajet du matin, c'est-à-dire le baou des Moulières, les Quatre-Chemins du Mai, la montée de Gavet...

Les nantis empruntaient l'omnibus, lourd véhicule tiré par deux ou quatre chevaux assurant le transport d'une vingtaine de passagers. Sur l'impériale, de joyeux lurons s'agitaient, arrosant les piétons de confettis, lançant des appels roucoulants aux belles. Le cocher ne parvenait pas toujours à se frayer un passage parmi les grappes humaines qu'il essayait d'intimider par les claquements de son fouet.

Au retour de la fête du Mai

Peu à peu, la foule grouillante se dispersait dans des nuages de poussière, surtout les jours de mistral. On ignorait alors le macadam et l'asphalte. Aussi, rentré chez soi, il fallait brosser minutieusement les vêtements du dimanche, poudrés à frimas.

Passé le mois de mai, la forêt connaissait des jours paisibles. Durant l'été, de rares promeneurs isolés ou en groupes, y venaient goûter les charmes de la pinède, se désaltérer à la fontaine, chercher quelque coin ombragé propice à un repas sur l'herbe, suivi d'une sieste bienfaisante.

À la fin du siècle dernier, La Seyne jouissait d'une grande notoriété de station touristique grâce aux réalisations de Tamaris : les casinos des Sablettes et de Manteau, les plages de sable fin. Les touristes qui y venaient nombreux poussaient parfois leur promenade jusque sous les grands arbres de Janas, et n'hésitaient pas à faire l'ascension du promontoire de Notre-Dame du Mai.

 

Des activités de toutes sortes

Et puis, l'été passé, avec ses chaleurs étouffantes qui gorgeaient les cigales de bon soleil, Janas perdait peu à peu cette odeur qui montait des aiguilles de pin surchauffées, croquantes sous les pas. Si, par bonheur, un des gros orages d'août avait rafraîchi l'atmosphère et imprégné l'humus d'une humidité bienfaisante, les anciens disaient ; « ça nous prépare la terre pour les champignons ".

Déjà, depuis le 15 août, la chasse était ouverte. Les promeneurs imprudents étaient rappelés à la réalité par les coups rapprochés de doublets dont étaient victimes lapins et perdreaux. À l'adresse du chasseur voisin, il s'exclamait : « Hoù ! Sauvage ! Ne me prenez pas pour un sanglier, au moins, hè ! "

Lorsqu'on parcourt le désert qu'elle est devenue, on a peine à s'imaginer la richesse de notre forêt d'autrefois en gibiers à plumes et à poils. Sans compter les migrateurs dont les passages constituent une animation régulière des crêtes et des taillis : bécasses aux plumes ardoisées, grives tachetées, merles au frac noir, impeccable, pigeons roucoulants, gros-becs, etc.

Les pluies de septembre amenaient dans la forêt les braconniers dont la vigilance était rarement prise en défaut. Les gendarmes faisaient bien quelques rondes, mais les halliers de Bramas et de Roumagnan étaient difficiles à contrôler tant la végétation y était dense.

De son côté, le garde forestier avait fort à faire avec la surveillance des coupes de bois. Les arbres destinés à l'abattage étaient marqués à la peinture rouge, puis livrés à la hache des bûcherons, puis, s'il s'agissait de pins maritimes au tronc rectiligne convertis par les scieurs de long en bois de charpentes ou en mâtures. Les souches résineuses débitées en menus morceaux étaient vendues pour allumer les fourneaux, et permettaient à des gagne-petit de faire commerce du bois gras en le revendant aux charbonniers de la ville.

Les petites branches, entassées, liées en fagots, que l'on appelle aussi des fascines, attendaient les charretiers qui les livreraient aux boulangers.

Mais une autre richesse était fournie par la forêt de Janas et ses grands pins : la résine.

 

Le gemmage

Le garde forestier avait aussi à charge de surveiller l'exploitation de la résine, car depuis le début du XIXe siècle, le gemmage se pratiquait à Janas, comme dans la plupart des forêts de pins et de sapins. La colophane, la térébenthine, tirées du galipot, trouvaient déjà de nombreuses applications dans l'industrie.

La vente de la résine et des bois représentait quelques ressources pour le budget de la commune, mais le garde forestier éprouvait les plus grandes difficultés à faire respecter les exploitations.

Il lui fallait surveiller les petits pots de terre cuite fixés au bas des troncs de pins, que remplissait lentement la substance visqueuse s'écoulant en perles fines et brillantes des longues entailles creusées à l'herminette.

Ces pots étaient des cibles faciles pour quelques garnements armés de lance-pierres qui, le jeudi, se faisaient un malin plaisir de provoquer des fracas sonores. Le garde forestier, furieux, lançait parfois à leurs trousses, des chiens hargneux.

Puis il lui fallait remettre les choses en ordre, remplir de résine des tonneaux de bois posés le long des sentes, qui étaient dotés d'un gros entonnoir métallique. Plusieurs jours étaient nécessaires à l'accomplissement de cette tâche.

Pendant longtemps, le gemmage procura quelques recettes au budget de la commune, mais il eut pour effet négatif d'épuiser la vie des grands pins à qui l'on soutirait la substance végétale.

On voit donc quelle importance a revêtu la forêt de Janas dans la vie quotidienne de nos anciens. Ces collines de Sicié étaient vraiment les mères nourricières de notre terroir. On en tirait le bois pour le chauffage ou pour la menuiserie, les plantes médicinales ou aromatiques, les champignons, les asperges, les salades et les fruits sauvages (mûres, arbouses, etc.), les limaçons, le gibier, qui amélioraient l'ordinaire, les pommes de pin et les brindilles pour allumer le feu, l'herbe pour les lapins... et jusqu'aux pignons échappés du cône du pin parasol, qui parfumaient la pâtisserie.

Il faut également évoquer une ressource de la pinède qui, pendant des siècles, fut indispensable à la pratique de la pêche côtière.

Aujourd'hui, les filets de pêche sont en fil de nylon, imputrescible. Jusqu'aux années soixante, furent en usage des filets en coton et en chanvre.

Faire tremper dans l'eau de mer ces fibres somme toute délicates, quotidiennement ou presque, n'allait pas sans quelques problèmes. Aussi, pour prémunir le fil du pourrissement, lui appliquait-on un traitement appelé la « tènche " ou teinture.

Il s'agissait de faire tremper ces filets dans un bouillon d'écorce de pin (rusco) pilée dont le tanin imprégnait le coton, le chanvre et même le liège des flotteurs ou nato, et empêchait l'eau de mer d'y faire ses ravages.

Si, depuis la guerre de 14, les patrons-pêcheurs de La Seyne, de Saint-Elme et du Brusc se fournissaient en rusco pilée auprès de bousquetiers du moyen Var, avant cette époque, ils allaient sur les coupes collecter l'écorce de pin et la pilaient au moyen d'un moulin semblable au moulin à farine, mû par une mule, et que l'on appelait le moulin à tènche ou le moulin à rusco.

Mais on ne saurait parler de nos ressources forestières sans évoquer ce qui est un des charmes de l'automne, la cueillette des champignons.

 

Les champignons

Si l'effet bienfaisant des pluies d'octobre se prolonge par quelques jours où la température est douce, les champignons font leur apparition, jetant dans les sous-bois quantité de promeneurs affairés.

On ne trouvait pas, voilà un demi-siècle, de conserve sur les rayons de l'épicier. Si l'on voulait avoir des provisions, il fallait se les faire ; voilà pourquoi nos mères passaient tant de journées à faire des bocaux de légumes de l'été, des coulis de tomates, des provisions de pois chiches, de fèves, de lentilles, des confitures, des raisins et des figues séchés et, bien sûr, des réserves de champignons.

La conservation des champignons peut s'effectuer selon trois méthodes : les cèpes, par exemple, sont mis à sécher au soleil, puis coupés en fines lamelles ; d'autres espèces sont noyées dans l'huile, le vinaigre et les aromates ; d'autres, enfin, sont conservées dans des bocaux stérilisés.

C'est que les variétés ne manquent pas ! On n'en finirait pas de décrire ces cryptogames si divers de formes et de couleurs.

Les amateurs accouraient de fort loin pour écumer les taillis. Le gros des troupes se concentrait le dimanche et le jeudi. Ces jours-là, en effet, les papets et les mamés à la patience inépuisable, initiaient les enfants à cette science précise du champignon. Il fallait d'abord leur permettre de reconnaître les espèces comestibles et les espèces vénéneuses, car s'il n'y avait pas de champignons causant une mort foudroyante, certains pouvaient provoquer des embarras gastriques très graves.

L'ancien maître d'école que je suis se souvient d'avoir emprunté les préoccupations du mycologue et parcouru nos collines le jeudi, pour recueillir toutes sortes de champignons qui seraient, dans les jours suivants, présentés aux élèves à l'occasion d'une leçon. Il fallait alors y aller précautionneusement, car certaines variétés ont une chair délicate, cassante et vite flétrie. Un lit de mousse assurait une conservation relativement convenable des trouvailles.

Les champignons les plus recherchés par les gourmets sont d'abord les cèpes. Pour leur pied renflé, sous la coupole bistre qui se dissimule si bien sous les feuilles de chêne, on les appelle les gros pécouis. On aime aussi les bolets communs appelés pissacans, que l'on fait sécher au soleil. On ne néglige pas non plus, loin de là, les girolles, à belle couleur orange, les russules, les oronges, les psalliotes, les clavaires ou crêtes-de-coq...

Après les bolets précoces, on se jette sur les lactaires délicieux que l'on appelle ici les safranets et ailleurs les sanguins ou les pignets.

Que d'émotions et que de joies quand on les devine sous la mousse qu'ils gonflent ! Parfois, ils dévoilent timidement une infime partie de leur chapeau safrané, comme si leurs efforts pour se dissimuler complètement étaient inaboutis. Mais ils font aussi une erreur, dans leur technique de camouflage, quand ils laissent apparaître au milieu de leurs teintes orangées, des tavelures vert-de-gris, qui n'échappent pas à la sagacité du chercheur chevronné.

Il y a toujours un imprudent pour s'exclamer, devant une découverte extraordinaire « J'en ai un superbe ! " Les autres accourent alors, sous prétexte d'admirer la trouvaille, mais en fait pour tenter de faire des découvertes semblables au même endroit.

Il faut en effet savoir que le safranet vit en colonies nombreuses, que les Provençaux appellent des rodou et qu'il vaut mieux, quant on met la main sur un de ces rodou, remplir silencieusement son panier.

Les enfants cachent difficilement leur enthousiasme. Ils courent comme des chiens fous dans le sous-bois odorant :

- Cherche bien autour des messugues ! dit la maman.

- Regarde, sous le lentisque ! conseille le papa.

Et chacun de courber l'échine, tentant d'aiguiser son regard fureteur. Parfois hélas, l'émotion fébrile fait causer de vrais ravages dans l'humus couvert de ramilles de pin. Ou bien c'est la colère d'avoir été abusé par un champignon d'aspect voisin qui se révèle, une fois cueilli, ne pas être un safranet. D'autant qu'il n'était pas question de rentrer à la maison sans avoir un panier plein. Qu'auraient dit les voisins si on revenait bredouille ? C'était une question d'honneur.

Si les safranets se font rares, on tapisse le fond du panier avec des vulgaires pissacans ou des morvellous ordinaires, et on dispose par-dessus les plus beaux lactaires, quelques cèpes, s'il y en a, pour donner au curieux l'illusion d'une cueillette miraculeuse.

Lorsqu'on allait à pied jusque dans les collines, les retours, s'ils ramenaient une belle provision, se faisaient avec force commentaires. On prenait quand même le temps de cueillir de la salade sauvage sur le bord du chemin : la chicorée un peu amère, mélangée avec des croustets, morceaux de pain grillé frotté d'ail, accompagnerait agréablement les safranets grillés.

Les familles italiennes, venues à La Seyne chercher du travail et qui s'y fixèrent, avaient introduit des recettes du Piémont ou de la Ligurie. On apprit à se régaler de belles polentas où les champignons de nos collines mariaient leur arôme au velouté de la sauce tomate à la viande. Mais les façons d'accommoder cèpes, pissacans, morvellous, safranets, etc... ne manquaient pas et chacun avait à cœur de laisser croire qu'il détenait un secret de famille.

Au bout du compte, cet aimable divertissement sylvestre vous laissait exténué. C'est qu'on en avait fait des allées et venues, on en avait montées, des pentes abruptes, on en avait franchis des buissons épineux. On rentrait donc fourbu, égratigné, mais repu de bon air et heureux d'avoir pu joindre l'utile à l'agréable.

Sur le chemin de retour où l'on n'était dérangé par aucune automobile, les petits se plaignaient parfois : « Allez, fais tirer, que la marche te fera bon sommeil ". Et le bambin, courageusement, reprenait sa route. Comment aurait-il pu faire autrement, quand une simple bicyclette était déjà un luxe ?

La saison des champignons passée, la forêt de Janas continuait d'accueillir Seynois et Six-Fournais qui venaient glaner toutes les ressources qu'offraient les grands bois. Nos anciens, il est vrai, tiraient parti de tout. Rien n'était gaspillé. Les temps ont bien changé...

 

Des menues ressources appréciables

Nous avons déjà évoqué les menues ressources de la forêt. Mais nos contemporains ne m'en voudront pas d'aller ici un peu plus dans le détail, ne serait ce que pour le plaisir de rappeler une fois encore cette multitude de petites activités où, au bout du compte, se sont usés nos anciens qui devaient ne pas manquer de volonté et d'imagination pour affronter les rigueurs de leur situation précaire.

C'est ainsi qu'il fallait, chaque année, récolter les fleurs de la salsepareille et des myrtilles pour faire de la liqueur. On approvisionnait aussi la maison en plantes aromatiques, comme le thym, le romarin, la sauge, qui servirait à parfumer les plats et à faire des infusions.

Les glands tombés des chênes par milliers, séparés de leur cupule, constituaient une excellente nourriture pour les lapins et les cochons.

Après les grandes mistralades, on allait au pied des pins parasols, ramasser les noyaux ou pignons que laissaient échapper leurs cônes résineux. Là encore, les amateurs ne manquaient pas, et l'on savait se régaler de la légère amande qui donnait un si bon goût aux pâtisseries.

Les arbousiers aux fruits rouges semblables à des fraises étaient dépouillés par des mamans qui pensaient aux confitures de l'hiver pour les goûters de leurs enfants.

Mais il leur fallait bien constater avec un peu d'amertume que les grives matinales et goulues avaient déjà prélevé leur part sur la récolte.

Il fallait aussi leur disputer les récoltes de mûres et de prunelles sauvages que l'on faisait aux prix de bien des égratignures dans des ravins bien connus.

Avec les pluies de printemps, sortaient de leur hibernation les escargots qui constituaient ces suçarelles devant lesquelles les étrangers au pays restent pantois et un peu écœurés. Et puis, bien sûr, on passait les sous-bois au peigne fin quand pointaient les premières asperges.

Le garde forestier surveillait les activités de tous ces visiteurs qu'il connaissait un à un. Il était particulièrement attentif aux activités des loups des bois, ces familiers de la forêt qui en connaissaient les moindres ressources. Ils étaient un peu braconniers, bien sûr. Il surveillait aussi les chasseurs, les charretiers, les bûcherons et ceux qui, sans autorisation, tentaient de prendre du bois mort ou, pire, de couper des arbres et des arbustes.

Parmi ses multiples tâches, le garde, comme on l'appelait plus simplement, devait afficher les dates d'exécution de tirs des fantassins logés à la caserne de la Gatonne devenue en 1931, l'École Curie.

 

Des visiteurs importuns

Ce jour-là, on voyait défiler de leur pas pesant, les soldats en capote bleu horizon et pantalons rouge, sac au dos, l'arme à la bretelle. Une arme qui fut longtemps le Chassepot et que remplaça en 1885 le Lebel (du nom de leur inventeur).

Ces fusils de guerre, à canon particulièrement long, les militaires les appelaient familièrement des flingots ou encore des cannes à pêche. Un terrain avait été aménagé en champ de tir à quelque cinq cents mètres à l'ouest de la clairière de Janas. Quand les militaires encasernés à La Seyne s'en allèrent, la végétation fit disparaître presque entièrement sa trace.

L'incursion des militaires sous nos grands arbres, ne se limita pas à cela. Durant la guerre de 1914-1918, on vit un jour arriver des engins blindés, monstres d'acier aux moteurs grondants, qui se déplaçaient sur des chenilles articulées aux grincements insupportables. Ils étaient surmontés d'une tourelle et d'un canon. Ils n'effectuaient pas des tirs, mais on procédait à l'entraînement des équipages sur terrains accidentés. Ces redoutables machines de plusieurs tonnes, capables de renverser de solides obstacles, étaient dirigées par des conducteurs invisibles qui n'hésitaient pas à foncer sur des pins d'un âge respectable, et dont le diamètre pouvait atteindre trente centimètres.

Alors, l'avant du véhicule se relevait légèrement, comme pour escalader le malheureux végétal qui en frémissait et le bel arbre, qui avait mis des décennies pour atteindre cette belle allure, s'effondrait avec fracas, écrasant dans sa chute, les plantes du sous-bois. Alors, le pilote, fier de son œuvre, exultait derrière sa meurtrière d'acier. Il paraît que ce massacre dérisoire servait à tester la puissance de l'engin...

Ce genre de manœuvre se multipliant, la forêt subit une agression considérable : les arbres arrachés, l'humus labouré, et une odeur entêtante de gaz d'échappement, rendirent méconnaissables de paisibles vallons. C'était la trace de cette horrible guerre que l'on menait dans l'Est du pays, et où tant de jeunes hommes furent fauchés par la mitraille, tant de maisons détruites, tant de terres rendues pour longtemps complètement stériles.

Voilà qu'au fil des siècles, Janas avait perdu son visage des temps anciens où y régnait une quiétude absolue. La forêt avait reculé devant la hache et la charrue, de grands espaces ayant été voués à la dépaissance et à la culture, dans les plaines et au flanc des coteaux.

 

La survie

Mais la forêt continue à régner sur Sicié de toute la splendeur de ses immenses pins et de ses chênes noueux.

Si les pins maritimes au tronc rectiligne, frappés par un mal qui devrait les exterminer un à un, pleurent leur résine sur des squelettes gris, les pins parasols à l'écorce rougeâtre, ont toujours le front altier. Quant aux pins d'Alep, qui sont les plus nombreux aujourd'hui, ils déploient leurs ramures tourmentées ou rugissent les souffles du mistral. S'il en est qui montent une garde solitaire sur les sommets du Peyras ou de Roumagnan, d'autres moutonnent au fond des vallons, leur tronc couvert d'un lichen verdâtre, toisant les roches plaquées de parmélie orange. D'autres encore s'accrochent désespérément par la moindre radicelle torse, aux versants abrupts du Jonquet ou du Cap Vieux.

Mais les plus beaux spécimens se trouvaient à la périphérie de la clairière que domine la maison forestière. Dès le printemps, quand la pleine lumière du soleil pénétrait les ramures, elle caressait les troncs, les écorces, les écailles résineuses des pignes, les fleurs jaunes de pollen, les fines aiguilles vernissées et faisait lever une forte senteur de térébinthe et d'aromates.

La maison forestière

Après la guerre de 14-18, l'Administration forestière, en accord avec les élus locaux, tenta de limiter les dommages que Janas subissait régulièrement. Les coupes de bois furent sévèrement réglementées, la cueillette des champignons et le ramassage du bois mort furent subordonnés à des autorisations du garde, et l'on punit sévèrement ceux qui arrachaient les plants.

Dans le même temps, la pépinière ouverte à l'entrée de la forêt fut enrichie. Le garde forestier eut à sa charge de surveiller la germination des graines en prévision d'un reboisement intensif.

Mais malgré toutes ces mesures de sauvegarde, notre forêt subissait toujours de graves préjudices. La population de plus en plus nombreuse se faufilait sous la futaie, dans les garrigues, des foules aux motivations les plus diverses exploraient les crêtes et les vallons : promeneurs, chasseurs, botanistes, géologues, artistes, militaires en exercice, pèlerins, amateurs de plein air, pique-niqueurs, chercheurs de champignons, de fruits sauvages, d'asperges, ramasseurs de bois mort... Parmi eux, des fumeurs imprudents, quand ce n'étaient pas des pyromanes, causèrent de grandes catastrophes.

Des incendies, qui naissaient subitement, lançaient leurs terribles flammes à l'assaut des crêtes, poussées souvent par un mistral au souffle irrésistible, et réduisaient à néant toute la flore du massif, ne laissant que des squelettes noircis, des tapis de cendre et des souches calcinées qui fumaient longtemps après l'extinction du feu.

On ne peut parler de la forêt de Janas sans évoquer les terribles incendies qui l'ont trop souvent ravagée. Que de fois, hélas ! depuis le siècle dernier, ces désastres ont défrayé la chronique...?

Nous n'épiloguerons pas sur leurs causes multiples, sur l'absence ou l'insuffisance de la signalisation, sur les retards avec lesquels les sauveteurs intervinrent, sur le manque de moyens rapides de transport, sur le manque de crédits pour entretenir les lais pare-feu, pour créer des retenues collinaires ou pour mener des actions de débroussaillement. Nous nous contenterons de rappeler quelques dates marquantes dans cette suite d'événements tragiques.

En 1868, un incendie d'une rare violence, parti du Brusc détruisit presque complètement les forêts de la presqu'île. C'était pitié de voir la masse du promontoire cithariste noire comme charbon. La végétation n'eut pas le temps de repousser quand trois ans plus tard, le 29 août 1871, un autre feu détruisit deux jours durant les bois communaux de La Seyne et de Six-Fours. Puis, en 1894, un autre désastre carbonisa la quasi-totalité de la presqu'île de Sicié.

Ce feu partit dans la soirée du 28 juillet 1894 du versant près de la mer, au hameau de La Lèque. Des marins et des soldats envoyés à la hâte depuis Toulon, ne purent contenir ce fléau. L'incendie descendit dans le vallon de Roumagnan, carbonisant les versants du Quicon, attisé par le mistral soufflant avec une rare violence. Il contourna ensuite la chapelle de Notre-Dame du Mai et eut tôt fait de rejoindre le Sémaphore pour repartir sur les versants Nord en direction de La Seyne. Il laissa derrière lui des centaines d'hectares calcinés. On trouva les cadavres de lapins, de perdrix et de toute la petite faune des bois. Les chênes-lièges à l'écorce épaisse s'en tirèrent à bon compte, mais les pins, brûlés jusqu'au cœur, furent livrés à la hache et à la scie des bûcherons. Combien d'années furent nécessaires à reconstituer ces grands bois ?

Le Maire de Six-Fours, Monsieur Esprit Simon, arrivant sur les lieux du sinistre, reçut un tel choc à la vue de ce spectacle apocalyptique, que rentré chez lui, il fut terrassé par une crise cardiaque. On lui fit des funérailles grandioses et il repose, dans le cercueil en plomb que lui offrirent ses administrés, au cimetière de Reynier.

Quarante ans passèrent sans trop d'incident et les bois commençaient à se régénérer quand en 1937, un nouveau feu dévasta aux deux tiers la forêt de Janas.

Plus près de nous, qui ne se souvient de cette catastrophe du 7 juillet 1979, qui transforma en cendres 300 hectares de forêt ?

Malgré des moyens de lutte modernes, nettement perfectionnés par rapport au siècle précédent, malgré la rapidité d'intervention des véhicules spécialisés et des avions Canadairs, il fallut malheureusement constater l'impuissance des hommes à maîtriser de tels sinistres.

Hormis ces quelques exemples particulièrement cruels, on pourrait dénombrer des dizaines d'incendies en forêt de Janas depuis le début du siècle, qui entraînèrent des dégâts partiels, il est vrai, mais combien regrettables.

Après l'action dévastatrice du feu, il fallait attendre les pluies de l'automne pour qu'au printemps suivant, réapparaissent des traces de verdure. Sur les troncs noircis des chênes-lièges, de jeunes pousses pointaient leur fraîcheur, les souches de bruyère et les lentisques endoloris repartaient du pied, symboles d'une résurrection tardive, mais certaine. Ce fut toujours étonnant de voir l'acharnement à vivre de ces végétaux maltraités.

 

Nouvelles agressions

La densité des chênaies et des pinèdes allait, d'année en année, en diminuant. La garrigue et le maquis gagnaient peu à peu du terrain, d'où émergeaient lentement les jeunes arbres des forêts futures. Mais leurs jeunes pousses terminales étaient alors la proie du bombyx processionnaire, redoutable chenille aux appétits insatiables. Dans la dernière phase de leur métamorphose, elles s'enferment dans d'énormes flocons cotonneux et moelleux pour y déposer leurs progénitures qui formeront l'année d'après, de nouvelles légions aux mandibules voraces.

À ces fléaux vint s'ajouter la maladie des pins maritimes contre laquelle la science ne connaît pas de remèdes. C'est pitié de voir ces beaux arbres dont les longues aiguilles s'étiolent et tombent, sous une coulée incessante de sève luisante. Ils sont alors livrés aux mains des bûcherons pour tenter d'enrayer l'épidémie en abattant les arbres malades.

La forêt fut ensuite quadrillée par des voies de pénétration de plus en plus nombreuses. Aux sentiers ravinés s'ajoutèrent les routes stratégiques. Les militaires défrichaient pour établir des batteries fortifiées et des postes d'observation au Peyras, à Fabrégas, à Bramas, au Sémaphore. Il arriva même qu'au cours d'exercices de tir, des fusées éclairantes provoquent des incendies difficiles à maîtriser.

Batterie du Fort du Peyras

Les conséquences du déboisement progressif et du recul de la forêt, on les comprit tardivement.

Les eaux de pluie qui ne sont plus filtrées par les ramures, le sous-bois et les racines, s'écoulent violemment, ravinent les pentes, aggravant l'érosion des sols. Elles se précipitent au petit bonheur des déclivités, causant parfois des inondations sur les routes et dans les quartiers bas. En outre, cette eau qui part inutilement à la mer n'alimente plus les nappes souterraines. Cela explique la disparition des sources, et notamment celles qui alimentèrent moulins et lavoirs des Moulières.

Une dernière agression dont a été victime le massif de Sicié, fut le percement du tunnel de l'émissaire. Nous avons vu combien cette réalisation fut primordiale pour les populations qui purent dès lors, bénéficier des commodités du tout-à-l'égout. Pourtant, ces travaux perturbèrent profondément le système hydrographique souterrain, ce qui eut de graves incidences sur la végétation.

Et pourtant, malgré tous les maux dont elle a souffert, notre forêt reste le grand poumon vert de La Seyne et de ses environs qu'il faut conserver à tout prix.

Il n'est pas inutile de rappeler ici l'importance de la végétation naturelle sur la vie humaine. Ce sont les végétaux qui produisent l'oxygène contenu dans l'atmosphère ; ce sont eux, aussi, qui absorbent et éliminent une partie du carbone, grâce à la fonction chlorophyllienne des feuilles. Mais dans l'époque où nous vivons, avec ses fumées industrielles ses échappements de moteurs, ses combustibles dérivés du pétrole et du charbon, la proportion de carbone augmente considérablement dans l'air et perturbe l'équilibre de l'atmosphère terrestre.

Les hommes, aujourd'hui, semblent avoir pris conscience de la nécessité d'accroître les espaces verts pour rétablir cet équilibre. C'est une lutte permanente qu'il faut mener à l'échelle planétaire.

 

La protection de la forêt

La défense de la forêt de Janas s'inscrit dans ce contexte général. Nos édiles locaux y ont pris une large part depuis la seconde guerre mondiale, en menant des actions incessantes en faveur du reboisement et en protégeant nos bois contre les incendies et les déprédations de toutes sortes.

En collaboration avec l'administration forestière, avec toutes les associations de défense de la nature, des efforts considérables ont été accomplis pour faire de Janas un lieu de détente et de repos pour la population. Il faut bien observer que les bénéficiaires de ces actions ne sont pas seulement les autochtones. Le caractère touristique de notre rivage méditerranéen attire en permanence des milliers de vacanciers venus de France et des pays étrangers.

A la suite du rand incendie de 1979, Mme Marie-Rose Brody, présidente des Amis de Janas et du Cap Sicié, dirigea alors, avec Daniel Hugonnet (1932-2019), président de l’Office Municipal pour l’Action Sociale et Educative (OMASE) et Raymond Macchi (1922-1991), garde-forestier, le programme de plantations en vue du reboisement de la forêt, avec la participation de centaines de bénévoles et de plusieurs classes scolaires. Ce programme s’accompagnait de la création de lacs artificiels où pourraient se désaltérer les oiseaux et les petits mammifères de la forêt.

Rappelons que Daniel Hugonnet, spécialiste des questions d'environnement, écrivait en 1973 :

« Les opérations dureront tant que le temps le permettra et devraient aboutir à la plantation de trois mille arbres annuellement, ce qui constitue la vitesse de croisière convenant actuellement aux besoins de la forêt ".

Les groupements de jeunes de toutes obédiences, les écoliers qui ont participé à cette œuvre exaltante qui se poursuivit avec succès, firent ainsi revivre le culte de l'arbre dont l'origine remonte, comme cela est dit au début de ce chapitre, à la plus haute antiquité.

Au début, on pensa surtout à remplacer les résineux facilement inflammables, par des eucalyptus. Puis, on s'orienta vers l'opération dite gland de chêne dont le but, à long terme, fut aussi de reconstituer la couverture végétale originelle.

Les scientifiques ont préconisé, non seulement pour La Seyne, mais pour tout le département, de reboiser en chênes liège et en chênes blancs qui constituaient autrefois l'essentiel de nos forêts. En outre ces espèces retiennent mieux les sols, offrent une plus grande réserve d'humidité que d'autres essences et permettent donc une meilleure régulation du climat.

Et puis, on en vint à se dire : « Pourquoi ne pas créer un microclimat à Janas par des retenues collinaires combinées aux opérations de reboisement ? ». Une première expérience a été faite qui s'est avérée positive, et des études montrent que d'autres retenues peuvent être aménagées, d'un volume variant de 2 000 à 10 000 m3.

Ces petits lacs artificiels offrent de multiples avantages : humidification de l'atmosphère, alimentation des camions d'incendie en cas de besoin, permanence d'une fraîcheur salutaire à la végétation, satisfaction des besoins en eaux de la faune, attraits pour les oiseaux sédentaires et migrateurs.

 

Janas aujourd'hui

Ces questions de lutte pour la conservation et la régénération de la forêt de Janas doivent être prises très au sérieux par tous les Seynois. De toute évidence, il faut constater que la population fréquente plus qu'autrefois les espaces boisés. La raison essentielle est la vie trépidante de la ville, la perpétuelle agitation qui nous emporte, les pollutions atmosphériques qui nous empoisonnent, la complexité de la vie familiale collective, professionnelle, qui soumet les gens à des tensions à la limite du supportable. Ils sont alors heureux de trouver dans les forêts le calme et la sérénité.

Les enfants ne peuvent plus jouer dans les rues, comme autrefois. Les vieillards n'ont plus le loisir de s'asseoir paisiblement sur le pas de leur porte en racontant pour la millième fois, les vicissitudes de leur vie passée.

Dans les nouvelles zones urbaines, rassemblant des masses humaines pour qui la cohabitation n'est pas sans aléas, les administrateurs tentent de créer des foyers d'anciens, des terrains de jeux pour les enfants, des espaces verts. Mais rien ne peut remplacer la nature des bords de mer ou de la forêt pour offrir à chacun les joies d'une vraie détente.

C'est bien pourquoi Janas voit affluer, en cette fin du XXe siècle, des milliers de gens de tous âges, de toutes conditions, avides d'air, d'espaces et de soleil, curieux des variétés qu'offre une végétation originale.

Georges Sand (1804-1976) n'y vint-elle pas herboriser, voilà plus d'un siècle ? Depuis, des botanistes célèbres, à la recherche d'espèces rares, arpentent la forêt en tous sens. Les géologues les plus éminents s'intéressent au socle primaire, résidu massif d'un ancien continent.

Et l'on ne peut citer la liste des romanciers, des poètes, des plasticiens, des musiciens qui ont été touchés, au hasard de leurs promenades, par la majesté des sites à laquelle le rêveur ordinaire ne peut être insensible.

On rencontre aussi quelques chasseurs, au moment de l'ouverture, à la poursuite de lapins, de pigeons ou de bécasses si rares qu'ils en deviennent mythiques. Enfin, les chercheurs d'asperges et de champignons y ont toujours leurs habitudes.

À l'occasion de débroussaillements, des particuliers furent autorisés à prendre du bois mort. La mode des cheminées aidant, les bûcherons amateurs firent résonner les vallons des stridulations de leurs machines crachant l'huile.

Mais les plus fidèles des visiteurs de Janas sont aujourd'hui les sportifs. Ils affluent chaque jour par centaines, gagnant un peu de souffle et d'endurance sur les sentiers rudes et parfumés ou le parcours sablonneux du Circuit Rustique d'Activités Physiques Aménagées (C.R.A.P.A.) qu'inaugura, voici quelques années, Jean Passaglia (1925-2020), Adjoint au Maire, qui restera, contre vents et marées, une des grandes figures du Sport seynois.

Depuis trente ans déjà, fonctionne au centre de la clairière, un camping municipal que Toussaint Merle (1911-1969), alors Maire de La Seyne, fit ouvrir au bénéfice des travailleurs des villes.

Camping municipal de Janas (début années 1980)

Nombreux sont les Parisiens, les Lyonnais, qui viennent y passer leurs congés annuels accompagnés de leur famille. Les toiles de tente, les caravanes, transforment la pinède, pour quelques semaines, en village estival. La proximité des rivages des Sablettes, de la Verne, de Fabrégas, des Baux Rouges, les incite à revenir chaque année toujours plus nombreux. C'est pourquoi, depuis sa création, il a fallu accroître peu à peu la capacité d'accueil du camping.

Camping et mobil-homes de la Forêt de Janas (année 2009)

N'oublions pas non plus les écoliers, les étudiants, accompagnés de leurs enseignants, venus par autocar pour parfaire dans nos bois, leur instruction sous forme de travaux pratiques, d'enquêtes et de recherches, qui sont la forme d'enseignement la plus vivante qui soit.

À l'occasion des fêtes votives, on voit encore les pèlerins reprendre avec ferveur le chemin de l'Aire des Mascs, de Bagno Camiso, qui les conduit à Notre-Dame du Mai.

Tous ces exemples attestent de la grande diversité que représente pour de si nombreux visiteurs, la forêt de Janas.

Aussi, les municipalités qui se sont succédé depuis 1947 ont eu du mal à gérer ce bien commun dont tous les habitants peuvent espérer la jouissance.

Il ne fut jamais facile, en effet, de concilier les desiderata des chasseurs désireux de s'adonner à leur passion et des amis de la Nature qui les traitent d'assassins. Il n'est pas simple non plus de faire comprendre aux fiers cavaliers poussant leur monture dans les petits chemins, qu'ils doivent montrer un minimum de déférence pour les piétons qui s'attardent quelquefois sur les pistes.

Le rôle des élus fut toujours de gérer équitablement notre patrimoine forestier, de façon à ce que chacun puisse satisfaire ses goûts et ses aspirations, tout en respectant et en préservant l'environnement naturel.

Cette œuvre délicate fut accomplie en quelques années. La Municipalité que dirigea Philippe Giovannini (1908-1989) créa en 1971 une commission extra municipale de l'Environnement qui se fixa comme objectif de faire de la forêt de Janas un lieu de détente et de promenade. Les actions menées dans ce but furent couronnées de tels succès, que la ville de la Seyne se vit décerner le 20 novembre 1972 un prix d'un million de centimes par la Fondation Berger.

Aujourd'hui, le massif de Sicié est donc un haut lieu touristique.

Empruntant la corniche merveilleuse qui relie le Brusc à Fabrégas, les promeneurs peuvent embrasser du regard un paysage sans pareil. L'Aire des Mascs, transformée en parking, accueille chaque fin de semaine des amoureux de beaux sites qui sont transportés par le spectacle qui leur est offert à tout instant d'une nature superbe.

Sentiers balisés du massif de Sicié - Janas

L'entretien de la forêt se poursuit, mené par des employés, mais aussi par des volontaires qui débroussaillent, replantent, entretiennent les sentiers balisés. La Ligue pour la Protection des Oiseaux (L.P.O.), qui agit notamment pour la faune en détresse, la conservation des espèces menacées, la préservation des espaces naturels, la connaissance des espèces sauvages, etc., a obtenu la création de refuges d'oiseaux qui s'étendent sur quarante hectares de terrains municipaux et de domaines privés.

Des points d'eau, des nichoirs ont été aménagés pour aider les espèces sédentaires et les migrateurs à se fixer dans la forêt. Il est bien évident que de telles réalisations ont demandé une réglementation stricte de la chasse, aussi bien dans la répartition géographique des terrains où elle est autorisée, que dans les plages de temps où elle se pratique. La chasse, d'ailleurs, n'est possible que grâce à des lâchers, puisque l'ensemble de la presqu'île, quadrillée par de nombreuses voies de pénétration, n'est plus un territoire ou s'effectue un repeuplement naturel.

Certes, tous les problèmes ne sont pas réglés ; la forêt communale qui a vocation d'être un poumon vert pour La Seyne et un lieu de détente pour sa population, demandera la poursuite de soins vigilants et de mesures courageuses, y compris, peut-être, la décision de la transformer dans sa quasi-totalité en zone piétonne.

Que nous voilà loin de Janus Foresta ! S'il avait aujourd'hui à jouer son rôle de protecteur de la forêt, sa tâche ne serait pas minime.

Là où coulait autrefois la source sacrée, aujourd'hui tarie, un grand parking accueille chaque jour des véhicules bruyants qui enfument le sous-bois. Allez donc convaincre les automobilistes impénitents des bienfaits de la marche à pied, en cette fin de XXe siècle !

Les pollueurs de la forêt, ce sont aussi les goujats qui répandent des ordures au mépris de tous les conseils des amis de la nature et de tous les règlements d'hygiène. La défense de l'environnement est vraiment une bataille de longue haleine... Elle sera gagnée à la condition expresse de mobiliser tous les citoyens, tous les éducateurs, dans la perspective exaltante de sauver la nature des dangers de la civilisation humaine.

Les problèmes écologiques doivent faire l'objet de nos jours d'une prise de conscience reposant sur le sens de la responsabilité individuelle et collective. La satisfaction des besoins physiologiques et psychiques des êtres humains en dépend étroitement.

Qu'il nous soit permis, en terminant cette relation qu'il fallait nécessairement actualiser, de formuler l'espoir de voir Janas survivre grâce à la compréhension de tous. Certes, l'utilisation équitable, telle que nous l'avons définie, cette sorte de planification obligatoire des utilisateurs de la forêt semblera monstrueuse pour les nostalgiques d'un passé où l'accès aux collines était libre. Mais est-ce possible autrement ?

Malgré toutes les attentions vigilantes, tous les soucis des écologistes, jamais, la forêt de Janas ne retrouvera son visage d'autrefois. Ce qui est en tout cas souhaitable, c'est que soient respectés définitivement les 374 hectares de bois communaux et les 185 hectares de bois privés existant sur notre territoire de La Seyne. Osons formuler l'espoir que jamais, ces espaces verts ne soient livrés à la rapacité des promoteurs, plus soucieux de créer des complexes lucratifs et des réseaux routiers, que de sauvegarder la nature et ses bienfaits.

Que les Amis de Janas et toute la population Seynoise attachée à sa forêt conservent la même ardeur dans la destinée et le devenir prospère de ce magnifique patrimoine que leurs ancêtres dédièrent à Janus Foresta... Voilà deux mille ans.



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