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du Tome VII
Marius AUTRAN
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Images de la vie seynoise d'antan - Tome VII (1999)
Préface de l'ouvrage, par Gérard TAUTIL

 

Difficile est l'exercice du préfacier. Aussi, présenter - trop rapidement - ce septième tome de Marius Autran est avant tout une invite à revisiter en zig zag La Seyne des ouvrages précédents. L'auteur des Images de la vie seynoise d'antan s'y livre et donne l'occasion à ses concitoyens de voir leur ville, à tout lecteur curieux celle de découvrir une construction dans laquelle hommes et territoire se conjuguent étroitement.

Il nous convie à poursuivre cet itinéraire seynois chevillé en riba de mar. D'une préhistoire esquissée au temps présent, Marius Autran continue son travail de déchiffrement patient, par touches et remarques successives, mise en évidence du fait archivé et des consciences qui se laissent deviner ou s'affirment. N'attendez pas de lui un travail universitaire ou d'histoire académique. Son angle d'attaque du temps passé est celui d'un homme qui ne prétend pas tout dire. Le récit est son rythme, le portrait et les souvenirs sa matière. Sans prétention et en toute sincérité. Même s'il se réfrène quand il aborde la période actuelle, préférant laisser aux générations présentes le soin de trouver elles-mêmes leur chemin.

1910, l'année de sa naissance, est l'occasion d'ancrer le passé plus ancien à celui de sa vie, de plain-pied avec ce siècle qui s'achève.

Pour celui qui ne connaît pas La Seyne, il est difficile de comprendre tout ce qui a changé au cours de ces dernières années. Marius Autran montre comment vivait en ce tout début du XXe siècle le petit peuple des campagnes et des rivages. La Seyne compte alors vingt-mille habitants.

Quand son père ouvrier et sa mère l'initient à la vie seynoise, celle-ci a pour trame la ville basse autour du port avec les hameaux qui commencent aux lisières de l'espace agricole proche. Le sable borde l'actuelle place des Esplageols jusqu'à la Bourse du travail. La Seyne connaît depuis deux ans le tramway et le rond-point des Sablettes (actuellement dénommé Kennedy) s'ouvre sur des cultures vivrières. Les Forges et Chantiers navals, les commerces, les petits métiers façonnent la vie économique. Le tourisme commence à prendre racine à proximité des espaces marins et des confins forestiers de Janas dont la diversité arboricole et herbacée témoigne de la fin du massif siliceux des Maures et de l'Estérel.

En contrepoint, l'immigration des babis et piantous, sollicitée par le développement industriel et la construction de la corniche de Tamaris, monte du Mezzogiorno et de l'Italie du Nord. Le racisme anti-italien s'exprime violemment avant de se transformer, quarante ans après, en intégration sociale à la provençale. Car tout le monde parle provençal sur le port de La Seyne, jeunes et vieux, pêcheurs, agriculteurs, commerçants, seynois de souche ou d'adoption. La bourgeoisie ne l'emploie pas publiquement, même si elle est bilingue.

L'État qui applique la loi sur la séparation de l'Église et de l'État (1904) enseigne dans les écoles la langue unique. Le phénomène n'est pas nouveau, il accentue cette distorsion entre un monde quotidien du travail, provençalophone, et un monde pour qui l'intégration sociale et culturelle se fera désormais en français.

Et pourtant, note Marius Autran quand il aborde le chapitre de la culture seynoise, les sociétés culturelles nombreuses qui animent la vie de la cité, de la musique à la langue d'Oc, expriment un esprit humaniste d'où tout racisme est exclu. Voyez ces Italiens du Piémont, ils parlent provençal aussi… Même le cimetière est dépositaire de cette mémoire culturelle dont l'enfant de Pezenas qu'èro mouart avant d'èstre nas, dit la légende de cette Dame Pézenas enterrée vivante en 1829, revenant à la vie en présence de détrousseurs de cimetières et donnant naissance ensuite à un enfant mort avant d'être né...

Les ouvriers seynois qui font des journées de 15 heures, vivent très difficilement, mangent au plus de la viande une fois par semaine, commencent à s'organiser dans les syndicats et dans le Parti Ouvrier. La Seyne vit au rythme de ses activités multiples dont le moteur est une société très diversifiée dans ses origines sociales mais dont le petit peuple est majoritaire.

Les questions de santé, d'eau et d'hygiène sont au coeur des municipalités successives et la Commune devra attendre longtemps avant de voir ses toupines et son torpilleur disparaître des rues et cesser d'alimenter les champs voisins.

La rupture que subit cette communauté locale vivant encore sur les franges d'une organisation sociale du XIXe siècle finissant se produit entre les deux guerres qui ébranlent l'Occident.

Dès la fin de la seconde guerre mondiale, la cité se transforme comme jamais. L'urbanisme se développe dans la démesure et l'entassement vertical à La Chaulane devenue Zone Urbaine Prioritaire, qui concentre tous les conflits sociaux que nous connaissons aujourd'hui. (Savez-vous que cette propriété du quartier de Saint-Jean de Berthe eut parmi ses propriétaires successifs un certain Pierre Laval, journaliste, venu racheter le Petit Var entre les deux guerres ?). Car la démographie grimpe, de nouvelles populations participent à la vie de la cité de la mer. La fin des chantiers navals et les projets de conversion attendus laissent la ville dans une profonde incertitude et un grand découragement tous ceux qui ont travaillé dans les entreprises navales et la sous-traitance.

La Seyne s'interroge sur ce que sera ce tournant du siècle. Ses plus de soixante mille habitants sont un potentiel important pour la seconde ville du Var. Son histoire tournée vers la mer, l'identité qui s'en est dégagée jusqu'à aujourd'hui indiquent une orientation possible que ni les pouvoirs ni les hommes ne doivent décevoir.

Que les élus seynois prennent le temps de se demander ce que devient un arbre sans racines. Et demandons à Marius Autran, cet éperdu amoureux de sa ville, d'en écrire encore, avec compétence et sensibilité, l'histoire.

Gérard TAUTIL


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