Lexique des termes provençaux et des « mots d'ici »
Lettre A
Abramé |
Avide, cupide (francisation du prov. abrama, abramado, enflammé de désir, affamé, âpre à la curée). cf. abramadisso : avidité, cupidité, désir immodéré. |
Acaner |
Abattre les olives avec un roseau (canne), gauler les fruits, les amandes, les noix, etc. (prov. acana, decana). |
Achoper |
Attraper (qqch ou qqn), contracter (un mal) (de l'argot français choper) (cf. aganter, pessuguer). |
Aclaper, enclaper |
Couvrir de pierres, enterrer, enfouir, ensevelir (prov. aclapa, de clapas, bloc de pierre, ou clapié, amas de pierres). |
Acò |
Ça, cela (pronom démonstratif neutre, 3e personne du singulier). Qu'ès acò ? (Qu'est-ce que c'est ?). |
Adiéu, adiou |
Adieu. Adiéu ! s'emploie pour dire à la fois bonjour et au-revoir, et aussi comme interjection, à l'annonce d'une mauvaise nouvelle, d'un malheur, un peu comme : Malédiction ! On dit aussi : Adiéu botte, sian foutus ! (dans une situation fatale ou désespérée, ou à l'issue d'une entreprise contrariée). |
Adu |
Participe passé du verbe provençal adurre : apporter, amener. « Segues li bèn-vengu, manjares ce qu'aves adu !... » (Soyez les bienvenus, vous mangerez ce que vous avez apporté !...), expression qui tourne en dérision les gens avares et peu hospitaliers. |
Agachoun |
Lieu d'où l'on épie, échauguette (du prov. agacha, guetter, épier, observer) ; espèce de hune adaptée au sommet d'un pin, où les chasseurs s'embusquent pour tirer au vol les oiseaux de passage. |
Aganter |
Verbe de structure française tiré du provençal aganta, attraper (cf. achoper, pessuguer). |
Agassin, agacin |
Petit cor au pied (durihoun), oeil-de-perdrix, excroissance (lùpi). Derraba un agassin (extirper un cor). On a mal à l'agassin quand le temps va changer. |
Age, Agi |
Grain de raisin. Lis agié : les grains tombés à terre, oubliés lors de la vendange. |
Aglariat, esclariat, esglariat |
Salsepareille d'Europe, salsepareille rude (Smilax aspera) : liane-arbrisseau épineuse à fleurs odorantes et à fruits rouges en grappes, qui bloque souvent toute progression dans les sous-bois. Infusions de racines sudorifiques et diurétiques. La fleur était autrefois utilisée pour parfumer des liqueurs (cf. rin vierge, saliège, tiragasso). |
Agrada |
Agréer, plaire, trouver à son gré. M'agrade de parla prouvençau (Cela me plaît de parler le provençal). Aquéu m'agrade mai (Celui-là me plaît davantage). |
Ah ! - Oh ! |
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Ai |
Aïe ! Ahi ! Ah ! (Interj. de douleur et de surprise). Ai de ma tête ! Ai de mes reins ! (Quelle douleur à ma tête ! à mes reins !). |
Ai, Aie, Ase |
Ane, bourriquet. Au mes de maï, si marridon que leis ai ! (Au mois de mai, seuls les ânes se marrient !) (cf. saumo, soumo, ânesse, bête de somme, bourrique). A ne surtout pas confondre avec l'ail, qui se dit en provençal aiet. Ainsi, si vous traitez quelqu'un de « con d'ai ! » et qu'il vous répond « et toi, con d'oignon ! », c'est que vous avez affaire à quelqu'un qui n'a aucune culture ! Par ailleurs, un ai cabanu est un sot, un butor, un vrai âne, un âne bâté (prov. ai, ase cabanié : celui qui vient en tête du troupeau). Pourquoi cabanu ou cabanié ? (le prov. cabanié signifie : qui habite une cabane). Peut-être un lien avec cavan, grand panier d'osier, qu'on imagine accroché au bât de l'âne pour le transport des fardeaux ? « Siou decida de mounta su moun ai - per ana vèire s'es verai » (Pastorale Maurel). « Que naï ! » Quel âne ! (le n est rajouté pour renforcer l'exclamation et éviter l'assonance avec ai !). |
Aici, eici |
Ici, par ici. Eici lou bon froumage ! |
Aiet, alhet |
Ail (Allium sativum), plante de la famille des liliacées, utilisée dans l'aiòli. De sèbe emé d'aiet (de l'oignon avec de l'ail). Veno d'aiet, gousse d'ail. |
Aiganha, eigagno |
Rosée du matin (prov. eigagna, faire de la rosée, bruiner). |
Aigo |
Eau. Audibert buou l'aigo : surnom d'un ancien Seynois, un paysan si avare qui ne buvait que de l'eau pour vendre tout son vin. Belle aigo (belle eau), expression qui aurait donné son nom au quartier de Balaguier. « Gaire d'aigo ! » (pas beaucoup d'eau !), disait systématiquement un célèbre Seynois - avec sa voix de rogomme - quand on lui préparait son pastis. |
Aigo-ardènt |
Eau-de-vie (litt., eau ardente). |
Aigo-sau |
Saumure, eau salée, mets de poissons bouillis (litt., eau et sel). A l'aigo sau ! : C'était l'appel du marchand d'escargots et de limaçons blancs. |
Aladèr |
Filaire ou philaria, arbrisseau très commun de la garrigue, de la famille des oléacées. L'espèce philaria à feuilles étroites (Phillyrea angustifolia) est l'aladèr mascle ; l'espèce à larges feuilles est le gros aladèr (cf. alavèr, taradèu). Aladèr semble aussi désigner le Nerprun alaterne (cf. fieragno) ou l'olivastre (oulivastre). |
Alibòfi |
Nom masculin pluriel désignant les testicules en termes grossiers (M'a rompu lis alibofi !). Trouve son origine dans aliboufier, nom commun du styrax (Styrax officinalis), arbuste de la famille des styracacées qui fournit une résine balsamique, et dont la forme des fruits rappelle les glandes génitales de l'homme. |
Aller |
Raccourci pudique de « aller à la selle », déféquer. « Prenez cette tisane, ça fait aller ». On disait aussi « aller en diarrhée ». (cf. lieu, aller au lieu). |
Allude |
Fourmi ailée utilisée comme appât par les braconniers pour prendre les oiseaux passereaux au piège (prov. aludo, arudo ; esp. aluda). |
Alors |
A la question : « Alors ? » ou « Et alors ? » que l'on pose à quelqu'un pour prendre de ses nouvelles, les plaisantins répondent parfois : « Et à l'or, il vient pas la rouille ! ». |
Alors oui ! |
Expression utilisée pour dissuader un enfant de faire une bêtise. |
Amande sucrée |
En Provence, on ne dit pas dragée, mais amande sucrée. |
Amandon |
Au sens propre, amande fraîche, amande qu'on mange verte (prov. amendoun) ; au sens figuré, testicules. |
Amouasser |
Réduire au silence, baisser d'un ton, mettre un bémol (prov. amoussa, éteindre). Amouassez un peu, les femmes ! |
An pèbre |
Année passée lointaine et indéterminée : « ça remonte à l'an pèbre ». |
Anchoïade |
(Prov. anchouiado) Sauce à l'anchois préparée à partie d'anchois et d'ail, que l'on fait fondre tout doucement dans de l'huile d'olive. |
Anchoye, anchoio |
Anchois, poisson de mer (Engraulis encrasicholus, famille des clupéidés). L'Anchoye : nom d'un personnage folklorique seynois du début du XXe siècle. |
Andaillon |
Forte risée (clapot) levée dès le matin par le vent de l'Est (prov. andaioun, mouvement ondulatoire d'une masse d'eau). |
Ange |
C'est ainsi qu'on appelle le fruit à aigrette plumeuse de certaines plantes de la famille des composées (pissenlit, crépis, salsifis, etc.) qui sont transportés par le vent et dont les grands-mères disaient : « N'y touche pas, si tu l'attrapes, tu montes au ciel… ». |
Ange bouffareou |
(Prov. ange boufarèu) Désigne l'ange de la crèche qui souffle dans sa trompette pour annoncer aux bergers la nouvelle de la naissance de Jésus. Par extension, on l'emploie pour évoquer un enfant joufflu, un visage ou un objet rebondi. |
Anguille |
Mot quelquefois prononcé anguile par les provençaux, peut-être sous l'influence du niçois anguilo ou du catalan anguila. |
Aoustin |
Petit poulpe du mois d'août (cf. póupre). |
A peu près |
Expression utilisée comme adjectif pour : correct, valable. Un outil à peu près. Il me reste encore un pantalon à peu près. |
Api |
(Prov. àpi, céleri). Employé dans l'insulte tronche d'àpi ! |
Apoltroni |
Apeuré, effrayé (prov. poultroun : poltron, couard, pusillanime). |
Après |
Parfois remplacé par à l'après. « Je te cours à l'après ». « Qu'un estron te courre à l'après... ». |
Aque |
Avec, probablement par contraction de l'ancien français avecque ou avecques. « Tu viens aque moi ? ». « Un aïoli du feu de Dieu, aque les escargots et la morue ! » (Marcel Pagnol). |
Aquéu, aquest, aquel, aquelo, aqueli |
Ce, cette, celui, celle, ceux (adj. ou pron. dém.) Sias ensucat de monta sus aquéu batéu (Vous êtes fous de monter sur ce bateau). Aqueli piantou que venoum mangea lou pan déi Seignen ! (Ces Italiens qui viennent manger le pain des Seynois !). Aquéu de cop ! (Ah ça alors !). Aquelo de bicyclette ! Aquelo empego ! (Elle est drôle, celle-là !). Aquelo d'aqui m'agrado mai (Celle-ci me plaît davantage). Aquéu pouarc de pichoun ! (Ce cochon d'enfant !). |
Aqui |
Là (près du lieu où l'on est), voilà. Que fas aqui ? (Que fais-tu là ?). Ve-l'aqui (le voilà). Aqui mai ! (Encore ! Et une fois de plus !). |
Aquigé, aquidgé |
Marqué, bouleversé, choqué, sonné, très affaibli après une grave maladie ou un coup dur ; frappé, blessé. [Dériverait de l'ancien argot français attigé]. |
Aquo, aco |
Cela, ça (pron. dém.) Aquo, par exemple ! Qu'es aco ? (Quest-ce que c'est que ça ?). |
Arapède |
Mollusque gastéropode comestible à coquille conique, appelé patelle (Patella caerulea), bernique, ou chapeau chinois, très abondant sur les rochers découvrant à marée basse. Par extension, s'emploie pour désigner une personne importune, dont il est difficile de se défaire : « Ils sont comme un biou-arpu et une arapède ». |
Arbous |
Arbousier (Arbutus Unedo), aux fruits d'hiver rouges et comestibles. Un lieu planté d'arbousiers est un arbousset, arboussié, ou darboussié. |
Arcan |
Individu sans scrupules, sans moralité, capable de combinaisons douteuses ou malhonnêtes ; magouilleur dont il faut se méfier. |
Arcinat |
Aubépine (Crataegus monogina). Le fruit rouge de l'aubépine est l'arcino, ou poumeto de paradis. |
Argeiras |
Genêt épineux, Ajonc de Provence, ou Calycotome épineux (Calycotome spinosa). |
Arlèri |
Désigne par dérision l'arlésien, habitant de l'ex-capitale de la Provence, considéré autrefois comme un homme orgueilleux. On dit il fait l'arlèri en parlant de quelqu'un d'infatué et fier de lui (cf. estraio-braso, esbroufaire, bravejaire). |
Arnaou (Meste) |
Maître Arnaud. Dires des contes de Meste Arnaou ou des histoires de Meste Arnaou : raconter des histoires hors du commun, extraordinaires, incroyables, farfelues. Faire des comptes de Mestre Arnaou : faire des comptes d'apothicaire. |
Arnavèu, arnavès |
Paliure (Paliurus Spina-Christi), arbrisseau très épineux de la famille des rhamnacées, également appelé Épine-du-Christ, Porte-Chapeaux, ou Argolou. |
Arriba |
Arriver, parvenir, atteindre, advenir, survenir. « Arribo lou marchand... et puis s'en va mai ». « Arriban plus, capoun de Bouan Diou ! ». |
Aroumi, roumias |
Ronce (Rubus fruticosus), liane épineuse de la famille des rosacées, qui donne les mûres. |
Arpu, arpudo |
Qui a des griffes (prov. arpo, griffe) : Un biòu-arpu est une coquille habitée par un bernard-l'ermite - qui laisse paraître ses pattes (cf. piade). Qui a les doigts crochus ou les ongles longs, qui est toujours prêt à prendre. |
Arsenacat |
Employé (ou ensembles des employés) de l'Arsenal de Toulon. Le pas de l'Arsenal, démarche lente et tranquille (cf. plan-plan) qui constituait autrefois une image du rythme de travail prétendument détendu des employés de l'Arsenal. |
Arsinat, poumédo de paradis |
Aubépine (Crataegus monogyna), arbuste de la famille des rosacées, à fleurs blanches et à baies rouges. |
Assaché |
Avis, annonce de faire-part des naissances, mariages, décès (du français assavoir, synonyme vieilli de savoir, qui ne s'emploie plus que dans l'expression faire assavoir). Deman, anaren faire lis assaché. |
Assèti |
Pierre plate, siège de fortune dans la nature. |
Até ! |
Interjection équivalant à : Il est passé, il est parti, on l'a manqué. |
Ato ! Ato sur ! Ato segu(r) ! |
Interjection signifiant : Eh ! bien, dame ! certainement, évidemment, d'ailleurs, du reste. Ato sur ! Le Maire, il l'a dit qu'il était pour de créer une société de musique. |
Aubijade |
Pêche à faible profondeur, à l'aube (à l'heure où la mer n'est pas encore agitée par les vents et à la condition expresse d'une parfaite limpidité des eaux). |
Aubijaïre |
Pêcheur qui exerce son activité à l'aube ; pêcheur qui pratique une variété de pêche appelée aubijade, qui collecte tous les animaux comestibles des mates ou des vaïres. Les engins qu'il utilise sont : la grapette, la fachouire, l'oursinière, le bouiou, le salabre, le gantchou. |
Aubo (n.f.) |
Peuplier blanc (Populus alba) (cf. piblo, pibo, peuplier noir). |
Aubo (n.f.) |
Aube, moment qui précède l'aurore, aurore. A l'aubo ! A l'aubo ! : C'était l'appel du marchand de sardines d'aubo, sardines pêchées au lever du jour. (Les sardines pêchées le soir sont des sardines de primo). |
Auceloun |
Oisillon, petit oiseau. |
Aucèu |
Oiseau, animal emplumé. Au péjoratif, individu quelconque, homme léger, sans valeur. Peut aussi désigner familièrement le pénis. |
Aucyprès |
Autrefois utilisé dans les campagnes pour cyprès. Le provençal de cyprès a en effet les variantes suivantes : ciprès, aciprès, auciprès, aucipriè, etc. |
Auco (n.f.) |
Oie. |
Auro, ouro, òuro |
Vent, souffle. |
Aveni (d') |
De race : provençau d'aveni (provençal de race). Arrivé par accident. Es vengu d'aveni : S'applique par exemple à une plante potagère qui s'est resemée seule et s'est développée en dehors de l'endroit habituel. |
Avoir |
Verbe employé parfois incorrectement à la place de être : « J'ai tombé ». |
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Jean-Claude Autran 2021